Née en Angleterre, développée en Allemagne, la marque Thomas Cook est, comme on le sait, désormais chinoise. La marque va-t-elle subsister ? On peut l’imaginer, comme le ClubMed — où le groupe Fosun est désormais majoritaire — a conservé son identité.
Créée vers le milieu du XIXᵉ siècle, la société comptait encore la semaine dernière environ 2 600 agences de voyages, 89 avions et 33 marques de voyagistes dans 15 différents pays. Qu’en restera-t-il ?
Car il ne faut pas s’y tromper, les Chinois de Fosun ne sont pas des philanthropes. Et quand on acquiert une boîte qui a été si mal gérée, le premier geste est de fermer toutes les filiales qui ne rapportent pas : cela évite de perdre encore plus d’argent.
Dans la foulée, on « dégraisse »… On ne vous dit pas les investisseurs, qui ont tout perdu. On songe d’abord aux employés qui vont connaître les affres du chômage, dans une conjoncture où le secteur du tourisme n’est guère porteur en termes de nouveaux emplois.
Le modèle n’a plus la cote
Comment en est-on arrivé là ? Le groupe invoque une mauvaise saison et… le Brexit pour justifier ses pertes abyssales de 2018. Mais quand il fait trop chaud, c’est pour tout le monde ! A y regarder de plus près, les difficultés de Thomas Cook ne datent pas d’hier.
Et ce n’est pas le changement de logo, voulu par une éphémère CEO en 2013, ni le carrousel des top managers, qui ont pu les empêcher. Encore moins le blog « Tango », dernier gadget avatar d’un groupe qui n’a jamais su communiquer. La crise était plus profonde.
Le modèle économique n’a plus la cote. Vendre à tout le monde des produits standardisés, cela appartient au passé. Certes, il restera toujours une clientèle pour laquelle le concept « all inclusive » estampillé Thomas Cook est un gage de sécurité. Mais cela ne séduit plus les nouvelles générations, que la vieille dame n’a pas voulu voir venir.
Une autre norme
« Le voyage sur-mesure sera la norme d’ici 5 à 10 ans », estime Grégoire Pasquet, directeur général de Worldia, qui propose en marque blanche des plates-formes qui permettent à ses partenaires — comme BT Tours mais aussi les agences de Thomas Cook ! — de distribuer en ligne des voyages personnalisables pour ses clients. Et il y a d’autres exemples.
Thomas Cook pourrait ainsi cesser ses activités de tour-opérateur. Tous ses avions sont déjà en vente mais n’intéressent pas Fosun. Brussels Airlines en a acquis quelques-uns, mais la vente de Condor à Lufthansa n’est toujours pas finalisée. Resterait une formidable base de données d’hôtels… mais qui ne couvre évidemment pas l’exhaustivité de l’offre.
Se cantonner dans un rôle de place de marché d’hôtellerie de loisirs, principalement au service de la clientèle chinoise, tel semble bien devoir être l’avenir peu glorieux de Thomas Cook. Et, bien sûr, vendre en ligne un maximum de ses pépites.