Des fake news qui tuent

Une anecdote de mon professeur d’histoire m’avait troublé et me fait toujours réfléchir. Il nous avait raconté qu’en août 1558, Charles Quint, dévoré par la malaria et la vérole, avait demandé qu’on célèbre ses obsèques « pour qu’il puisse voir qui le regretterait ». Et puis, il est mort. Cela m’avait troublé et je me disais qu’au fond, ce n’était pas bête: quelques jours avant la mort qui se dessine, pourquoi ne pas la précipiter dans les journaux via la nécrologie et, aujourd’hui, via les réseaux sociaux, histoire de voir les réactions.

En vérité, en relisant plus tard la vie de Charles Quint, passionnante au demeurant, il s’est avéré (enfin, via les bouquins) que l’empereur avait demandé à son confesseur de tenir plusieurs messes d’obsèques pour ses ancêtres, sa femme, Isabelle de Portugal, et pour lui-même. On était fin août 1558 et il a agonisé jusqu’au 21 septembre. Mais soit, retenons l’idée.

Il y a sûrement un doigt d’orgueil à vouloir savoir ce qu’on dira de vous après votre mort, mais quand même une curiosité légitime. Maintenant – et j’ai vécu cela lors de maladies sévères -, il y a des amis qui se révèlent, des femmes qui sont sincèrement bouleversées, mais aussi des hommes qui n’en ont rien à faire. Cela dit, si on joue la treizième carte du tarot (la mort), il faut en assumer les conséquences. Contrairement à ce que vous croyez, il n’y a pas que des gens qui vous aiment. Alors, peut-être, autant ne pas savoir.

Exemple vécu

Alors, pourquoi vous dis-je tout ça ? Parce que j’ai vécu l’expérience. Pas pour moi, mais pour mon complice de toujours. Eh bien, ce n’est pas drôle du tout. Cela a commencé par un SMS : « Tu es au courant de son décès ? » Heureusement, je l’avais eu en ligne une heure plus tôt. Je réponds. Et puis, ça s’emballe : SMS, mails, coups de téléphone jusqu’à des heures pas possibles.

J’essaye de remonter à la source en traçant les mails (vive les « réponses à tous ») et averti les propagateurs qu’ils se gourent, qu’ils auraient mieux fait de vérifier « AVANT », plutôt que de m’appeler « après » et qu’ils préviennent leurs réseaux. Ah oui ! C’est beaucoup plus difficile de reconnaître qu’on a envoyé une fake news non vérifiée plutôt que, bille en tête, relayer une information non vérifiée. C’est du reste cela la différence entre les journalistes et les adeptes des réseaux. Les journalistes vérifient, les autres non. Les journalistes rectifient, les autres non.

Dégâts collatéraux

Malheureusement, en envoyant innocemment des fake news sans vérifier, on fait beaucoup de tort. Le fils de mon ami a eu un message de condoléances sur son smartphone ; on imagine le choc ! Quant à moi, heureusement que je l’avais eu en ligne car un tel message m’aurait mis par terre, évidemment. Depuis lors, je passe à démentir ou à répondre au téléphone à des gars qui me disent : « Ah, ben tu me rassures ! Et sinon, comment vas-tu ? Cela fait longtemps qu’on ne s’est plus vus ! » Toujours pendant mon journal télévisé ou quand je suis à table, bien entendu.

L’avantage est que mon ami est une bien belle personne, à lire les messages de condoléances qui circulent sur le net, grâce aux « réponses à tous ». Alors, on a des « oui, je l’ai bien connu lorsque nous étions à… » et pas mal de compliments. Je cherche seulement les anecdotes croustillantes. Pas encore trouvées.

En tout cas, la bonne nouvelle est qu’il est bien vivant et que les lecteurs de PagTour pourront encore lire ses reportages. Ah oui, tiens, je ne vous ai pas dit qui c’était. « He is living and well », notre Étienne de Nil.

A lire ou relire : Covid 19, c’est pour les autres ! Stupide erreur !

 

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