Selon le dernier sondage des intentions de vote organisé par la RTBF et La Libre, le PTB serait devenu le deuxième parti politique en Wallonie. Pour les politiciens du sud du pays, ce genre de sondage s’apparente à un séisme politique, même si certains se rassurent en se disant qu’entre les intentions de vote et les votes réels, il y a sans doute une différence.
Pourquoi donc les Wallons voteraient-ils pour un parti dont l’idéologie est ouvertement communiste et qui, en plus, a déjà indiqué qu’il ne voulait pas gouverner ? Certes, récemment, le PTB a indiqué qu’il était prêt à partager le pouvoir avec un parti qui rejetterait l’Europe libérale et la mondialisation. Autant dire qu’avec ce genre de contrainte, le PTB ne risque pas de gouverner demain.
Bref, ses dirigeants, qui sont des communicateurs nés, préfèrent garder le ministère de la parole plutôt que de diriger réellement la partie sud du pays. Les dirigeants du PTB sont un peu comme ces passagers irritants – les Anglais les appellent les « back seat drivers » – qui sont assis sur le siège arrière, ne conduisent pas, mais vous font des commentaires sur votre conduite tout au long du trajet.
Alors pourquoi ce vote en faveur du PTB, ou plutôt ces intentions de vote ? La raison est qu’une partie de la population est angoissée, elle a peur. De quoi ? C’est très simple, elle a peur du chômage, peur de la précarité, peur pour son pouvoir d’achat, peur pour ses enfants qui feront face à une société plus dure et plus cynique.
Une partie de la population a aussi peur de l’Europe, jugée lointaine et élitiste, elle a peur du monde, de la mondialisation et donc de l’autre, qu’il soit Syrien, immigrés ou voisin de palier. Et comme la classe politique traditionnelle n’est pas à l’écoute de cette peur, elle n’est plus écoutée.
« Les diverses formes de peur alimentent le fonds de commerce du PTB »
Pourtant, cette peur, bien que légitime, est mauvaise conseillère. Le publiciste Jacques Séguéla a raison d’écrire qu’elle est l’ennemie du courage, l’amie de l’anxiété, la peur, il faut le dire, émascule l’ambition, elle est destructrice de confiance, elle dynamite le progrès. La peur de soi, la peur de l’autre, la peur d’être seul, la peur d’être agressé, la peur de demain, la peur du chômage, la peur du déclassement social, la peur du terrorisme, la peur de la mutation, la peur de vieillir… Bref, au final, toutes ces diverses formes de peur alimentent le fonds de commerce du PTB. Plus qu’un parti marxiste, le PTB est d’abord le parti des stakhanovistes de la peur.
En fait, les dirigeants du PTB sont de fins sociologues, comme le faisait remarquer le politologue Alain Duhamel. Ils ont compris que nous sommes tous les fils et filles de nos ancêtres les Gaulois, et donc, nous redoutons à tout instant que le ciel nous tombe sur la tête. Pourtant, le monde a toujours été plein d’incertitudes, mais les médias et les réseaux sociaux nous forcent à nous concentrer sur l’instant présent, en nous faisant oublier le passé.
Nous venons de quitter un siècle qui a connu deux Guerres mondiales, dont l’une atomique. Nous avons connu cinquante crises économiques, dont l’une planétaire. Et vous savez quoi ? Nous avons survécu ! Comme l’écrit joliment Jacques Séguéla, la sortie de crise nous oblige à tourner la page – tout reste à inventer – et n’oublions pas que les optimistes ont inventé l’avion, les pessimistes le parachute.