Petit lexique du vocabulaire disruptif appliqué au tourisme 

Le phénomène prend quasi tous les mois de l’ampleur : des mots plus ou moins nouveaux apparaissent, on les utilise à tort et à travers pour faire “genre”. C’est un phénomène qui nous vient de l’anglais, une langue adaptative propre à créer des mots à l’infini en prenant les radicaux d’autres mots. Ainsi le “disruptif” de mon titre, qui est bien d’origine anglaise, et qui signifie “créant une rupture avec ce qui était d’usage précédemment”.

Le tourisme n’échappe évidemment pas à ces nouvelles fonctionnalités ! Cela commença, je pense, avec l’appel bien utile à la numérisation, c’est-à-dire l’emploi d’informations sous forme de nombres, nécessitant de la high tec. Et comme tout le monde saisissait bien le concept de nombre, on a évolué vers la digitalisation, ce qui, étymologiquement, signifie l’emploi de ses doigts. Sous-entendu pour toucher un écran, taper sur des touches, etc. Et ce mot a fait le buzz, un mot qui ne signifie rien d’autre que de la communication événementielle.  

Autre avancée importante, et sans raillerie cette fois, la RSE ou Responsabilité Sociétale des Entreprises : on semble la découvrir alors qu’elle devrait être depuis longtemps un concept intuitif dans toute entreprise, et surtout du voyage, si l’on veut assurer la Transition. Remarquez bien qu’on ne parle déjà plus de “transition écologique”, on dit simplement “transition”, par une sorte d’appropriation du langage général vers un emploi particulier. 

Un concept nouveau dans l’hôtellerie (et c’est loin d’être le seul) : le coliving, lequel facilite le coworking. Les hôtels ont vite compris l’intérêt de proposer une expérience client différente, inclusive et non-genrée.  

Dans le domaine du régressif, n’oublions pas le tourisme mémoriel qui est réellement expérientiel. Alors que pour combattre le surtourisme, on parle maintenant de réguler les flux touristiques.  

Pensons aussi au vaste domaine de la gastronomie : combien de fois n’ai-je pas entendu, à Top Chef entre autres, un chef se pâmer devant un plat dit régressif parce qu’il ressemblait à la cuisine de sa grand-mère ? Aujourd’hui, on ne parle plus de “cocktails sans alcool”, mais bien de mocktails, le terme mock anglais signifiant imitation. Et puisqu’on est dans les produits de bouche, je relève un titre magnifique dans l’hebdomadaire Max (groupe Sudpresse), qui, se penchant sur les marques dans les grandes surfaces, titre “Labels de caddies”. Jacques Chirac aurait qualifié ce jeu de mot d’abracadabrantesque, un mot qu’il n’a pas inventé d’ailleurs, mais emprunté à Arthur Rimbaud dans son poème Le Cœur volé. Cela m’a mis en joie !  

Le tourisme, le voyage, l’expérience client, tout cela contribue à l’happycratie ! Qu’on se le dise. 

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