« Paradise Papers, le bal des hypocrites »

Le scandale des Paradise Papers arrive à point nommé pour les hommes politiques…

Alors que les politiques doivent redresser les comptes publics, en reportant l’âge de la pension, en diminuant les salaires des fonctionnaires ou en réduisant certaines dépenses sociales, les Paradise Papers arrivent au bon moment. La raison ? Les révélations du scandale leur permettent de dire que si nos écoles ne sont pas aussi performantes, que les hôpitaux ne sont pas aussi modernes, que les infirmières sont mal payées et que les fonctionnaires ne disposent pas des équipements nécessaires, c’est la faute à l’évasion fiscale des multinationales et des ultra-riches.

Pour reprendre les propos de Margrethe Vestager, la commissaire européenne chargée de la Concurrence, ce scandale des Paradise Papers offre une fenêtre de tir fantastique aux politiques pour profiter de la colère des citoyens et renforcer la lutte contre la fraude fiscale. Mieux encore, la droite et la gauche seront unies pour affirmer la bouche en coeur que ces multinationales et ces ultra-riches profitent du système au détriment des salariés, des petits indépendants, des classes moyennes et des PME.

Mais en réalité, hormis ce discours offensif, rien n’a changé dans la pratique. Les scandales se succèdent à la Une des médias (Wikileaks, LuxLeaks, Panama Papers, Paradise Papers) et la seule chose qui change, ce sont les noms des célébrités livrés en pâture au public.

Prenons l’exemple des Panama Papers, à part quelques démissions fracassantes comme celle du Premier ministre pakistanais, du Premier ministre islandais ou du ministre espagnol de l’Industrie, le système fiscal global est resté en place.

« Les principaux paradis fiscaux sont des pays « normaux » comme les USA, la Grande-Bretagne, les Pays-Bas… ou la Belgique »

Et pire encore, il y a le discours officiel, et puis l’hypocrisie de nos dirigeants. D’abord, si les médias ont beaucoup parlé des paradis fiscaux exotiques, ils oublient de préciser que les principaux paradis fiscaux sont des pays « normaux » comme les États-Unis, la Grande-Bretagne, les Pays-Bas, le Grand-Duché du Luxembourg ou la Belgique. Tous ces pays, très dignes en apparence, ont des régimes de faveur qui les transforment en paradis fiscaux pour certains ressortissants étrangers ou pour les multinationales.

Et vous savez quoi ? Ces pays ne sont pas près de supprimer ces niches fiscales. Au contraire, ils les peaufinent. Aux États-Unis, la principale réforme de Donald Trump consiste à baisser drastiquement l’impôt des sociétés. En Grande-Bretagne, l’idée caressée par les politiques est de réduire fortement l’impôt des sociétés pour établir un paradis fiscal de l’autre côté de la Manche pour compenser les aspects négatifs du Brexit. La Belgique n’est pas en reste puisque l’impôt des sociétés sera réduit en 2018. Pourquoi toutes ces réductions d’impôts ? Parce que la concurrence fiscale fait rage entre les États et s’ils veulent garder ces entreprises sur leur sol, il faut leur offrir ce qu’elles demandent.

Autre exemple: chacun sait que les géants du numérique ne paient quasi pas d’impôt grâce à leurs montages fiscaux légaux. Tout le monde s’en plaint. Mais quand Amazon annonce, il y a quelques jours, qu’elle cherche une ville de plus d’un million d’habitants pour abriter son deuxième quartier général et ainsi générer 50.000 jobs, vous avez immédiatement une frénésie qui agite toutes les villes américaines pour attirer ce nouveau QG… Il y a même une petite ville, Stonecrest, qui a proposé de changer de nom et de se rebaptiser Amazon !

Et puis, il y a également l’hypocrisie de ceux qui fustigent toute cette évasion fiscale. Les commissaires européens sont schizophrènes, car ils fustigent la fraude, mais profitent, en tant que fonctionnaires européens, d’une fiscalité plus douce que le commun des mortels. Par ailleurs, leurs collègues de l’OCDE, qui sortent régulièrement des rapports sur la fraude fiscale, oublient juste de rappeler qu’eux-mêmes paient moins d’impôts et de cotisations sociales que les autres fonctionnaires. Je pourrais continuer de la sorte, y compris avec les avantages fiscaux des médias et des ONG, mais à quoi bon ? Gardons juste à l’esprit que les Tartuffes de Molière ne sont pas morts…

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