Plus que jamais, en cette période d’épidémie, j’adore les personnes qui pensent différemment des autres. C’est le cas de Marc Fiorentino, un ancien trader parisien reconverti dans le commentaire financier (meilleurplacement.com). Pourquoi ?
La raison : lui, au moins ne peut pas être accusé d’échanger des idées toutes faites contre des idées reçues, comme dirait Philippe Bouvard. Avec sa verve habituelle, Marc Fiorentino nous rappelle que le monde d’avant, c’est terminé. Il rappelle aussi que nous sommes toujours en attente du fameux « monde d’après », tant vanté par les futurologues de tout poil. En réalité, comme il l’écrit dans sa lettre d’information, nous ne sommes plus dans le monde d’avant ou d’après, mais « nous sommes dans le monde d’avec ».
Avec quoi, direz-vous ? Essentiellement avec de l’incertitude ! Face à cette incertitude, il y a deux manières de l’aborder, soit en prenant la pente du négativisme, du genre « mais quelle rentrée, mes amis ! » ou « je ne sais pas ce qui nous attend demain ». Voilà pour notre inclinaison négative naturelle. Ou alors, et c’est l’attitude préférée de Marc Fiorentino, nous optons pour une démarche plus constructive, plus optimiste.
D’abord, se dire et se répéter que cette incertitude est relative. Nous savons que nous allons tous devoir subir ce masque protecteur pendant des mois encore mais, comme il l’écrit, il y a pire dans la vie. Soyons réalistes, ce masque n’est pas un masque de fer que nous serions condamnés à porter à vie. Nous ne sommes plus sous Louis XIV et le roman d’Alexandre Dumas ne peut pas nous servir de guide pour lutter contre la pandémie. Dans six mois ou neuf mois, un vaccin sera là ou alors, c’est ce virus qui sera en déclin. D’ailleurs, sauf retournement de situation, ce virus tue aujourd’hui moins qu’il y a quelques mois.
Non, en réalité, le message de Marc Fiorentino est simple : le danger est de se glisser dans une sorte d’apathie confortable ou dans une attitude de procrastination. En clair, de reporter tout (consommation, investissement) au lendemain sous prétexte d’incertitude. Il faudra, bien entendu, apprendre à vivre avec le monde d’avec. D’avec le masque mais se préparer déjà maintenant à l’après. Motif ? Le monde d’après arrivera plus vite que prévu.
Rudy Aernoudt, un autre économiste, belge celui-ci, vient de consacrer un livre sur l’impact du Corona en Belgique (Coronavirus, électrochoc pour la Belgique ?). L’économiste gantois nous y explique que demain ou après-demain, les gagnants de cette crise seront les assureurs (ceux qui n’ont pas d’assurance hospitalisation en contracteront une sans délai et les assurances-vie vont connaître un renouveau), ce seront les banquiers (la crainte de perdre son argent durement gagné poussera vers les placements sans risque), mais l’Horeca et l’événementiel tireront aussi leur épingle du jeu.
Aussi étonnant que celui puisse paraître, après la peur, le deuxième moteur du monde de demain sera le divertissement. Bref, l’envie d’oublier le premier moteur, la peur.
A ceux ou celles qui douteraient de la justesse de ce pronostic, je leur conseille de relire l’histoire moderne d’Israël et du Liban. La peur des bombes ou les séquelles de la guerre civile ont servi de moteur pour la vie nocturne à Tel Aviv ou à Beyrouth. Quant aux entreprises, elles devront – télétravail oblige – redevenir attractives pour leurs employés.
Jacques Attali a raison d’écrire que l’entreprise de demain devra adopter les codes de l’hôtellerie de luxe pour rendre plus accueillants les lieux de travail, et en particulier les sièges sociaux. L’hôtellerie pourra aussi influencer positivement l’aménagement des hôpitaux et des maisons de repos. Jacques Attali a raison, le monde de demain, ce sont des chantiers passionnants. Mais en attendant, il faudra « faire avec » le monde d’aujourd’hui.