L’Istrie, un balcon sur la mer Adriatique (2)

Les ruines toutes romantiques du palais byzantin sur l’île principale de Brijuni témoignent de la longue histoire du lieu

A la proue du vieux continent sur la mer Adriatique, l’Istrie a sans doute servi d’objectif stratégique pour les grands empires qui se sont partagé l’Europe depuis l’Antiquité. Mais elle a chaque fois reçu en guise de dot un magnifique trousseau, offert au fil des siècles par Rome, Byzance, Venise et Vienne. Presque à la pointe sud de la péninsule s’ouvre une baie paisible cernée d’oliviers, de cèdres et de mimosas : un coin de paradis que les Romains envahissent pour y fonder une colonie, Pula, qui deviendra un centre commercial de premier plan.

Entre aqueducs et bains publics, portes monumentales et temples soutenus par des colonnes corinthiennes, la cité regorge de vestiges mais le plus impressionnant est l’amphithéâtre qui domine le port, un des plus beaux encore debout.

L’amphithéâtre romain de Pula en est le monument le plus imposant et le plus emblématique

Quand les flots lumineux du soir ou du matin se déversent par les 72 arches ouvertes sur le ciel bleu, les pierres érodées semblent s’animer et réveiller la colossale fragilité d’un géant qui pouvait accueillir près de vingt mille spectateurs avides de combats de gladiateurs.

Au large de Pula s’égrène la douzaine d’îlots de l’archipel des Brijuni aujourd’hui classé parc naturel. Des centaines de biches y gambadent en toute liberté, à peine effrayées par les rares touristes qui choisissent de s’y égarer en dehors des caravanes organisées.

L’occasion de remonter le temps en flânant au cœur des ruines d’une grande villa romaine envahie par les pins et les cyprès ou encore d’un ancien Kastrum byzantin cerné de murailles blanchies par la luminosité saline. De criques en criques baignées par une eau d’un bleu intense, on en vient à oublier que le maréchal Tito avait fait de ces îles sa résidence d’été où il aimait à recevoir, dans un volontaire dépaysement, les têtes couronnées et les nouveaux riches éblouis par la beauté naturelle du site.

Cap sur la côte.

Contrée de vignes et de vergers, truffée d’abris et de myriades d’îles, la côte déroule son littoral jalonné de plages couvertes de pins parasol et de petits ports pittoresques qui rappellent l’Italie. C’est que Venise est à portée de rames et elle a marqué de son empreinte ce territoire qui lui a donné le vin, l’huile d’olive et surtout les chênes dont elle avait besoin pour consolider sa ville bâtie sur des pieux.

Rovijn qui s’enroule autour de son église se vit à pied dans ses ruelles pavées longées de petites boutiques

Posé sur une presqu’île, le port de Rovinj tourne vers la mer ses jolies façades aux teintes chaudes. Hautes et étroites, les maisons s’appuient les unes sur les autres dessinant un dédale de venelles qui s’entortillent entre des passages voûtés, se recoupent et s’enlacent sous le regard figé de lions ailés.

Des grappes de linge sèchent aux fenêtres, des nonnas en noir s’interpellent d’une croisée à l’autre, des chats somnolent sur le perron des maisons.

2000 ans de patine ont érodé les gros pavés ronds qui mènent vers le sommet de la colline, là où se dresse une cathédrale dont l’élégant clocher semble sorti tout droit de la Cité des Doges. Là-haut, la vue se dégage vers un horizon bleuté qui rappelle que la mer est omniprésente avec son clapotis au pied d’un escalier ou au bout d’une impasse, avec sa jetée installée au fond d’une anse où dansent voiliers, yachts de plaisance et barques de pêcheurs.

Les venelles du vieux quartier de Rovinj possèdent un charme singulier qui en a fait le repère des artistes de tout poil

D’un port à l’autre, la dolce vita rythme la vie des habitants, à peine balisée par le tintement des cloches des campaniles qui ont germé sur cette terre. A Poreč, la vision panoramique saisie du haut de la tour dessine les contours d’une ville dont les toits de tuiles rouges dévalent en cascade jusqu’à la plaine tapissée de vignes et d’oliviers.

De l’autre côté s’étire à perte de vue une mer cristalline parsemée d’îlots qui sont autant de perles vertes. Les bateaux-taxis, les paquebots et les chalutiers glissent doucement en creusant un sillon bleu frangé d’écume.

Certains édifices du front de mer à Poreč rappellent que la ville est passée au début du 19ème siècle dans le giron de la couronne d’Autriche

Parcourir la petite cité d’un quartier à l’autre, c’est un peu comme tourner les pages d’un livre d’histoire. Deux rues tracées par les Romains et encore pavées de marbre érodé traversent la ville de part en part. Longées de maisons romanes, de demeures gothiques et de palais baroques, elles racontent un Moyen-Âge cossu et commerçant.

Des places aux arcades très italiennes, des tours vénitiennes, un forum romain, autant de souvenirs d’un passé animé. Mais le véritable joyau de Poreč est sa basilique Euphrasienne, magnifique témoignage de l’art byzantin dont les mosaïques réalisées sur fond d’or sont un chef d’œuvre de finesse qui n’est pas sans évoquer le coup de pinceau des pointillistes plusieurs siècles plus tard.

Au-delà des pêcheurs on devine la vieille ville de Rovinj blottie autour de son campanile sur une péninsule de forme ovoïde

Savoureux mélange que l’Istrie, terre de métissages qui laisse rêveurs ceux qui n’hésiteront pas à parcourir en journée les paysages verdoyants de l’arrière-pays, loin de la chaleur du littoral pour y revenir à l’heure du couchant quand la brise du soir allonge les flâneries paresseuses sur le port des vieilles cités.

Images paisibles d’un quotidien sans façons que les Croates partagent volontiers avec l’étranger.

A lire ou relire : L’Istrie, un balcon sur la mer Adriatique (1)


Informations : Auprès de www.croatia.hr ou encore auprès de  www.istra.hr 

Quand y aller : Les touristes belges sont les bienvenus en Croatie mais ils doivent être en mesure de présenter les documents requis (contrat de location, acte de propriété, réservation d’hébergement, leasing d’un bateau…) à la frontière, précise l’Office du tourisme croate en Belgique pour éviter toute confusion. Les voyageurs doivent en outre compléter un formulaire sur le site http://entercroatia.mup.hr pour éviter une longue attente à la frontière.

Se restaurer : Paradis gastronomique, l’Istrie est célèbre pour trois produits : le vin, l’huile d’olive et les truffes. Pour découvrir un menu qui se décline jusqu’au dessert autour de la truffe, www.zigantetartufi.com.

L’Istrie est un paradis pour les amateurs de bonne chère entre vins blanc ou rouge, huile d’olive et surtout des truffes qui figurent parmi les meilleures au monde

La région est réputée pour son huile pour ses remarquables qualités gustatives. Pour les amateurs, une route lui est consacrée d’un producteur à l’autre. Le domaine d’Ipša est le premier croate à être cité dans le guide très sélectif Extravirgine consacré aux meilleures huiles d’olive https://ipsa-maslinocaulja.com. Plus de quinze mille ha sont consacrés aux vignobles. Les variétés autochtones de malvoisie et de teran ont été primées dans plusieurs foires européennes. A découvrir d’une cave à l’autre.

Une anecdote : C’est aux Croates que l’on doit notre cravate, qui a été inspirée par le foulard noué autour du cou que portaient les soldats croates lors d’un défilé militaire à Paris sous Louis XIV ! Séduits par cet accessoire, les Français l’ont adopté et adapté en le nommant « à la croate » qui au fil des siècles a évolué en « cravate »…

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