C’est sur cette question qui nous interpelle tous que s’est penchée une étudiante en tourisme dans un brillant mémoire de fin d’études. Le problème apparemment ne touche qu’une infime proportion des touristes, mais il existe bel et bien !
Michèle s’est penchée sur 4 syndromes du voyageur, parmi plusieurs autres. Mais ces 4 là sont -ou pas- reconnus par les psychiatres, et ne sont pas -ou peut-être que oui- pris en compte à la fois par les compagnies d’assurances et les offices de tourisme.
Le premier de ces syndromes est appelé Syndrome de Florence
(ou de Stendhal, l’écrivain ayant été semble-t-il le premier à le décrire.) Il ne nous a pas vraiment convaincus, avouons-le. Il s’agirait d’une émotion très intense, allant jusqu’à la syncope, provoquée par l’abondance d’œuvres d’art dans une ville telle que Florence.
Évidemment peu de personnes tombent en syncope devant une œuvre d’art, en revanche l’émotion provoquée par une œuvre peut aller jusqu’aux larmes, c’est très fréquent. Et donc il nous semble qu’il s’agisse plutôt ici d’un syndrome du beau, du chef d’œuvre, où qu’il se trouve, plutôt que d’une pathologie liée à la ville de Florence et encore moins aux voyages en général.
Le syndrome de l’Inde
Le deuxième est bien plus connu, et reconnu en psychologie : c’est le syndrome de l’Inde. Il survient assez fréquemment à cause du choc culturel qui frappe le voyageur occidental arrivant pour la première fois en Inde, sans s’être bien documenté. Et c’est vrai que ce choc existe ! Hergé, dans le Lotus Bleu, avait mis en scène quelques fous ; Kipling aussi.
Citons Michèle Unterberg :
« A peine sorti de l’aéroport, (le voyageur) enregistre beaucoup trop de facteurs inconnus, comme s’il pénétrait dans une autre réalité, il y a une perte de repères. Il y a l’odeur suffocante de la pollution qui le frappe de plein fouet, la chaleur et l’humidité, le bruit constant des klaxons, la fatigue qui lui tombe dessus après un long vol, il se sent loin de tout, les Indiens sont trop intrusifs avec leurs regards, le harcèlement perpétuel, les chiens errants et les vaches sacrées littéralement partout, la surpopulation ou encore la misère omniprésente. Le voyageur est sidéré. »
Le psychiatre Régis Airault dit : « Les fous vont en Inde »
Il parle de personnes ayant des idées mystiques ou persécutives. Ceci dit, le syndrome ne touche qu’une quarantaine d’Occidentaux chaque année, sur quelques 10 millions de voyageurs qui se rendent en Inde : il reste que le pays est fabuleux, et qu’il faut le voir !
Le troisième syndrome est appelé « de Paris »
Il touche les Japonais qui, ayant en tête à la fois une image très romantique, idéalisée, de Paris ainsi que leur propre manière de vivre dans une organisation parfaite, une propreté, un respect inégalés, se trouvent confrontés à ce qu’ils considèrent comme le summum de la désorganisation, de la saleté et de la grossièreté.
Alors ils craquent. En fait, il est très probable que nous subissons un syndrome de Tokyo quand nous allons au Japon : c’est l’exact inverse du premier, agissant en miroir.
Les mystiques
Enfin un quatrième syndrome évoqué dans ce mémoire est celui de Jérusalem. Nous avons affaire ici à un mysticisme parfois très passager, de personnes qui tout à coup se sentent investies d’une mission religieuse ou mystique.
Elles se vêtent alors d’une grande robe blanche, marchent dans les rues en psalmodiant et en prophétisant. *
C’est sans doute le plus drôle des 4 symptômes évoqués, puisque ces faux mystiques, une fois dans l’avion du retour, reprennent une vie normale comme si rien ne s’était passé. Mission oubliée.
Conclusion de notre étudiante ?
« Il y a très peu de psychiatres qui croient à ces syndromes du voyageur et ce sont surtout les médias qui aiment entretenir ce mythe de « pays pathogènes » ou de pays qui peuvent rendre fou, avec des cas et des faits divers tous plus impressionnants les uns que les autres. Tout le monde n’est pas pareil mentalement et émotionnellement ».
C’est la sagesse même.
Avec Michèle Unterberg