Air France-KLM, Lufthansa Group et IAG ont dégagés d’importants bénéfices ces derniers mois. Ils souhaitent tous désormais s’inviter dans le mouvement de consolidation du secteur, avec comme cibles prioritaires l’italienne ITA Airways, la portugaise TAP Air Portugal et l’anglaise easyJet.
La crise sanitaire a quelque peu rebattu les cartes du ciel européen. Ainsi, Air France-KLM est reparti sur de bonnes bases. Le groupe franco-néerlandais a engrangé 460 millions d’euros de bénéfice net au troisième trimestre, après un second trimestre déjà dans le vert, lui permettant d’espérer terminer l’année sur un bénéfice d’exploitation supérieur à 900 millions d’euros, proche de celui de 2019.
Ses deux grands concurrents, le Lufthansa Group (Lufthansa, Brussels Airlines, Swiss, Austrian, Eurowings) et le groupe IAG (British Airways, Iberia, Vueling, Aer Lingus, Level) ont eux aussi retrouvé le chemin des profits. Lufthansa Group a enregistré un bénéfice net de 809 millions d’euros au troisième trimestre, tablant désormais sur un bénéfice avant intérêts et impôts (EBIT) supérieur au milliard d’euros en 2022. IAG a de son côté réalisé un bénéfice net de 853 millions d’euros au troisième trimestre, après un second semestre lui aussi positif.
Plusieurs explications à ces bons résultats. Un très bon été bien sûr, avec d’excellents taux de remplissage, le fruit des plans de réduction de coûts également, mais aussi des prix orientés à la hausse pour reconstituer les marges.
Exsangues il y a encore quelques mois, au sortir d’une crise terrible, et malgré des cours du pétrole élevés et un taux de change euro/dollar défavorable, les compagnies membres des grands groupes aériens européens trouvent désormais les ressources pour reconstituer leurs fonds propres, réduire leurs dettes et rembourser leurs prêts, parfois même de manière anticipée. Il leur faut dans le même temps moderniser leurs flottes avec des avions moins gourmands en kérosène.
Face aux menaces persistantes, entre guerre en Ukraine, risques de récession et de reprise de la pandémie, ils savent aussi que certains transporteurs aériens sont fragiles et ont besoin de s’adosser à l’un d’entre eux. Il s’agit désormais de saisir les opportunités de rachat ou de prises de participations.
La première cible toute désignée s’appelle bien sûr ITA. En août dernier, le gouvernement italien – l’Etat est actionnaire à 100% de la compagnie qui a succédé à Alitalia – choisit comme « partenaire commercial et opérationel » un consortium formé par le fonds d’investissement américain Certares (en tant que partenaire financier), Air France-KLM et Delta Airlines, estimant leur offre “la plus conforme aux objectifs fixés». Un choix qui se fait au détriment de l’offre concurrente portée par le groupe Lufthansa associé à l’armateur italo-suise MSC. S’engagent alors des négociations exclusives entre les différentes parties.
Ces négociations de vente sont arrivés à leur terme et désormais rompues, vient de faire savoir le ministère des Finances italien à la surprise générale. Le revirement pourrait être lié au récent changement de gouvernement à Rome. Le nouveau ministre des Finances, Giancarlo Giorgetti, n’a jamais caché en effet sa préférence pour l’offre Lufthansa-MSC. Mais l’on ne peut aujourd’hui exclure de nouveaux rebondissements, sachant également que la cheffe du gouvernement Giorgia Meloni a dans le passé manifesté son opposition à la privatisation d’ITA.
L’autre cible est TAP Air Portugal. Air France-KLM est sorti le premier du bois pour témoigner de son intérêt pour la compagnie portugaise, si celle-ci venait à être de nouveau privatisée. Ben Smith, le directeur général du groupe franco-néerlandais, s’est déclaré favorable à une prise de participation dans le capital de TAP. IAG et Lufthansa Group ont annoncé ces jours-ci être eux aussi sur les rangs pour le transporteur lusitanien.
Le projet d’acquisition d’Air Europa par IAG, ramené finalement à une participation de 20%, n’a pas coupé l’appétit du groupe anglo-espagnol. Lequel aimerait mettre aussi la main sur la grande concurrente de sa filiale British Airways, easyJet… Alors que la famille Haji-Ioannou possédait 33,7% de la low-cost britannique en 2019, elle a vu sa participation fondre et a perdu sa minorité de blocage il y a quelques semaines. Mais IAG n’est pas seule : la low-cost hongroise Wizzair est également intéressée.
Dans le cadre de ces futurs rapprochements, les choix tiendront-ils compte de l’appartenance à telle ou telle alliance aérienne ? On rappellera en effet que ITA Airways a remplacé, les semaines suivant sa création, Alitalia au sein de l’alliance aérienne SkyTeam, laquelle compte parmi ses membres Air France-KLM et Delta Air Lines. TAP, elle, est membre de la Star Alliance, de même que Lufthansa.