Le Guide Michelin vire-t-il au politiquement correct ?

Lundi fut sûrement le jour le plus long pour la communauté des chefs des restaurants de France et de Navarre. Le Guide Michelin allait dévoiler son édition 2019. Bonheur et déception allait être de la partie. Et cette année la déception allait commencer par la presse car le nombre de journalistes invités à l’événement avait été drastiquement réduit. Surement une excellente idée de la nouvelle direction !

Le Guide Michelin aurait-il oublié tout ce qu’il doit à ces journalistes spécialisés qui tout au long de l’année dans leurs articles et revues de restaurants contribuent à valoriser le fameux guide rouge comme le repère suprême de qualité pour les voyageurs gastronomes du monde entier ? Le Guide Michelin ne devrait pas trop se laisser aller à prendre une attitude jupitérienne.

A l’annonce des noms des heureux bénéficiaires du graal aux 3 étoiles, il y eut des larmes de joie mais aussi beaucoup d’incompréhension.

Les deux nouveaux promus Mauro Colagreco (le Mirazur à Menton) et Laurent Petit (Le Clos des Sens à Annecy) ont bien mérités de l’avis de tous cette troisième étoile qui fait rêver.

Par contre le déclassement de l’Auberge de l’Ill de Marc Haeberlin a été un coup de tonnerre et a semblé être, pour beaucoup, quelque chose de totalement incompréhensible. Cet établissement triplement étoilé depuis 1967 a toujours été considéré comme le symbole de la gastronomie française. On aimerait bien savoir ce que les inspecteurs du Michelin ont bien pu trouver à lui reprocher.

Quant à Marc Veyrat (photo ci-contre) qui lui aussi est privé de sa troisième étoile, on peut légitimement se demander comment le Guide Michelin a pu lui accorder l’année dernière cette troisième étoile pour la lui retirer l’année suivante.

La cuisine de Marc Veyrat manquerait-elle totalement de suivi ? En tout cas Marc Veyrat n’a pas apprécié une telle inconsistance des notations et a déclaré que le Guide essayait cette année de faire du buzz !

Dans la même veine, à coté des nouveaux promus ayant décroché une deuxième étoile, brillant témoignage de leur travail permanent et de l’extrême créativité de leur cuisine (Bravo en particulier à Hugo Roellinger pour le Coquillage à Cancale et à Stéphanie Le Quellec pour la Scène, le restaurant de l’Hôtel Prince de Galles à Paris) il est difficile de comprendre la perte de la deuxième étoile du Carré des Feuillants à Paris (Alain Dutournier) et de Taillevent (David Bizet). Les habitués de ces deux restaurants, et ils sont nombreux, apprécieront à sa juste valeur cette douteuse décision.

Du coté des établissements ayant mérité une étoile, on note une importante promotion de 68 nouvelles tables contre 50 l’année dernière. Ce qui porte leur nombre à 520, une belle indication de la bonne santé de la gastronomie française, toujours riche de nouveaux talents avec de nombreux jeunes (et moins jeunes) chefs qui se donnent à fond dans leur travail.

Pour en avoir rencontré un certain nombre, mener une équipe en cuisine et arriver à maintenir tous les jours le niveau d’excellence extrême d’une table étoilée est loin d’être une sinécure. C’est avant tout du travail, du travail et encore du travail avec il faut bien le dire une belle dose de talent.

Il est simplement dommage pour l’image du Guide Michelin que Gwendal Poullennec (photo), son nouveau directeur international, ait senti le besoin de signaler que cette année le Guide Michelin avait choisi de promouvoir un grand nombre de chefs féminins.

N’allez pas croire que je puisse le moins du monde penser que seuls les hommes peuvent être de grands chefs. Je ne serais pas le moins du monde gêné si la majorité des chefs étoilés étaient des femmes, mais pour moi le sexe du chef n’a pas à être pris en compte dans l’évaluation d’un restaurant, mais seulement la qualité de la cuisine proposée.

Cette impression que le Guide Michelin se veut « politiquement correct » laisse un petit goût amer. Et si la parité lui semble un critère si important de choix des meilleures tables, peut-être pourrait il équilibrer dans sa sélection de l’année prochaine, les chefs au crâne plus ou moins dégarni et ceux que Dame Nature a pourvu d’une abondante chevelure ?

Mais il ne faudrait pas jeter le bébé avec l’eau du bain, le Guide Michelin reste quand même la Bible des amateurs de haute gastronomie, un monument dont aucun gastronome ne pourrait se passer.

Frédéric de Poligny

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