La vraie révolution du commerce n’est pas dans le numérique, mais dans l’hybridation

La fin d’année est toujours propice à s’interroger sur les signaux faibles, ces changements imperceptibles, cachés ou pas, mais que personne ou presque ne voit.

Si vous faites un micro-trottoir sur l’avenir du commerce, tout le monde dira qu’il passe forcément par le numérique. La réponse est juste, mais incomplète, comme l’explique Gabrielle Halpern, une philosophe qui cartonne en ce moment auprès des dirigeants d’entreprise en France (1).

Pour Madame Halpern, nos métiers, nos commerces et les business de demain ne seront pas seulement plus numérisés, ils seront surtout hybrides. L’hybridation est le mot qui sera à la mode demain. Prenez l’exemple d’une gare, dit-elle. Avant la gare servait à faire circuler des trains, elle n’avait qu’un rôle ferroviaire. Aujourd’hui, dans certaines grandes villes, on peut aussi y faire ses courses, du sport, des analyses de sang, déjeuner ou voir un film sans prendre le train. D’où la question : est-ce encore une gare ?

De même, demain, lorsque la voiture autonome sera là, faudra-t-il voir notre voiture comme une carrosserie autour d’un logiciel ou plutôt comme une pièce supplémentaire de notre maison. Une sorte de salon ou de salle de cinéma. Comme nous ne conduirons plus, il faudra bien nous occuper. Lorsque l’on regarde une voiture comme un espace de convivialité, où l’objet finit-il et où le service commence-t-il ?

Même regard décentré sur les centres commerciaux de demain : ils seront de plus en plus des lieux où on ira pour se cultiver, se rencontrer, apprendre et pas seulement acheter et vendre. Le centre commercial reprendra la place centrale du village, le point de repère pour se rencontrer. La restauration a déjà pris énormément de place dans les centres commerciaux, au point où en parle de distri-ration, contraction de distribution et restauration.

Mais on ira plus loin encore. Gabrielle Halpern cite sur Smart TV l’exemple des Galeries Lafayette dans la ville de Reims. Elles ont signé un partenariat avec le Musée des Beaux-Arts de Reims pour installer les oeuvres d’art dans les vitrines des Galeries Lafayette. Alors, sommes-nous devant un magasin ou plutôt un musée ou encore une hybridation de deux mondes ? Bonne question ?

L’idée, comme l’explique cette philosophe, c’est que les clients ne viennent plus seulement pour acheter des biens, mais pour vivre des expériences. L’idée n’est pas tant que les clients augmentent leurs achats, mais qu’ils soient fidélisés et reviennent très régulièrement pour vivre des expériences positives. En fait, comme le fait remarquer cette philosophe, alors « que les boutiques servaient initialement à vendre des biens matériels, l’enjeu des grandes marques maintenant, c’est la part immatérielle – la frontière entre certains magasins et les parcs d’attractions va devenir floue ».

C’est stimulant comme pensée. On est loin de la mort annoncée du commerce sous les coups de boutoir du e-commerce. La vraie révolution du commerce ne sera pas dans le numérique, mais dans l’hybridation – c’est une excellente nouvelle en cette fin d’année !

(1) Tous centaures, éloge de l’hybridation, aux éditions Le Pommier

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