La nouvelle route Bruxelles-Cracovie, inaugurée début avril par la compagnie aérienne belge, donne des ailes à l’ancienne capitale polonaise qui rappelle ses atouts à l’occasion d’un mini famtrip séduisant.
L’inauguration est discrète. Pas de grande réception dans les salons du lounge de la compagnie belge du réseau Lufthansa. Mais un gros gâteau à la porte de l’embarquement, au milieu des passagers qui marquent déjà leur satisfaction de prendre un vol direct pour Cracovie – «Un petit city trip avec des amis historiens» nous précise une personnalité belge passée inaperçue sous les drapeaux déployés.
Petra Buelens, Leisure Key Account Manager Belgium, et Javier Equisoain Blanco, Corporate Key Account Manager Belgium, sont à la manœuvre pour la compagnie aérienne, sur base d’un programme concocté par Joanna Lupínska, PR & Promotion Manager du Polish Tourism Organisation, venue à Brussels Airport pour assister au départ.
Le leisure s’envole chez Brussels Airlines
Forte d’une année 2023 exceptionnelle, la compagnie avance, en même temps que la demande du marché et donc des envies des voyageurs. C’est clairement le leisure qui fait voler Brussels Airlines. Petra Buelens, qui entraîne le groupe d’organisateurs et d’agents de voyages sur ses premiers pas dans la ville polonaise, ne cache pas son enthousiasme : « Les gens voyagent de plus en plus et la demande est plus grande que l’offre puisque celle-ci, au niveau mondial, n’a toujours pas repris au même rythme qu’avant la crise. Evidemment, les prix sont conséquents, et nous devons proposer à la fois des destinations nouvelles et des tarifs très flexibles pour occuper les sièges. Ainsi nos différentes formules en Business ont beaucoup de succès – les passagers jonglent avec ce qui leur convient : sièges, transferts, lounge, … ».
Congés scolaires et bleisure
Autre paramètre en faveur de cette imposante reprise : le nouvel étalement des congés scolaires : « Nous le sentons sur toutes les destinations. Fini les pics gigantesques en été et au moment des petites semaines. Non seulement, les réservations sont plus étalées mais les gens voyagent davantage. »
En revanche, Javier Equisoain Blanco n’imagine pas une forte augmentation des chiffres coporate sur cette route : « Les voyageurs business volent plus sur Varsovie et Wroclaw. Mais cette nouvelle ligne provoquera peut-être le retour de certains qui partaient de Charleroi. Et, oui, on peut imaginer que certains souhaitent compléter leur déplacement d’affaires par un séjour de loisirs et découvertes, le temps d’un week-end ou quelques jours. Ici, ils peuvent désormais envisager cela en repartant de Cracovie. » Cela s’appelle le bleisure, le voyage qui combine business et loisirs. Il peut être encouragé par l’entreprise (stratégie de développement personnel et de bien-être au travail) comme par le travailleur (stratégie d’économie de transport et d’équilibre de vie). Ne pas oublier de le proposer aux concernés !
Visiteurs belges en augmentation
En tout cas, côté polonais, on se félicite de cette initiative. Dominika Szulc, Director of Polish Tourism Organisation, notait déjà une augmentation de 6% des visiteurs belges en 2023. « Des repeaters et des voyageurs qui s’y rendent deux fois par an. Ils sont attirés, dans l’ordre, par les prix, la nature et les équipements disponibles sur place. Les Belges organisent leurs visites autour de la culture, les musées et l’architecture de nos villes, ils visitent des amis ou de la famille et participent à des événements culturels. »
La nouvelle ligne de Brussels Airlines et la visite des professionnels belges laissent envisager de nouvelles offres et une présence plus accrue du pays dans les catalogues. « Surtout Cracovie, désormais à moins de deux heures de Bruxelles, dont l’offre culturelle et le coût de la vie très abordable, en plus d’une bonne gastronomie, semblent correspondre à ce que les Belges souhaitent. C’est un bon marché et nous attendons une belle augmentation. »
Cracovie, à table !
Cela étant posé, après 25’ de retard et un vol de deux petites heures dans un A319 pratiquement plein, le groupe est directement plongé dans une Pologne à l’ancienne. A une demi-heure de l’aéroport Krakow-Balice, un restaurant tout en bois, décoré de dentelles et de peaux d’animaux, donne le ton de ce que la capitale du royaume de Pologne, toujours haut-lieu de la culture du pays, aime à promouvoir : un charme romantique, un peu suranné, une histoire affichée sur les façades qui racontent les époques et dans les assiettes roboratives qui évoquent la diversité des peuples qui ont foulé le territoire.
Outre les incontournables pierogis, des raviolis cuisinés et fourrés à toutes les sauces et de toutes les tailles, ici, le régime, c’est : soupes, saucisses, rillettes, fromages fumés, viandes panées, choux, pommes de terre. Au pluriel, souvent local et de saison. On est à l’Est.
Magdalena, qui nous guide, en profite pour vanter les hivers de son pays, notamment dans les montagnes des Tatras. La station de ski Zakopane, à moins de deux heures, est la destination hivernale la plus populaire. Les sports, les thermes et les Noëls aux ambiances très festives pour réchauffer les corps – « mais l’atmosphère est aussi très spéciale sur la place du marché de Cracovie, la plus grande place médiévale européenne. »
Cracovie, sous la terre
Cette introduction culinaire convient parfaitement à la première visite qui impressionne : la mine de sel de Wieliczka, au sud-est de la ville. Un des plus anciens gisements de sel gemme au monde qui, depuis la fin des activités, en 2007, est devenu un lieu-phare de la géologie industrielle et une des attractions les plus populaires de Pologne.
800 marches pour rejoindre les différents niveaux jusqu’à 135m sous terre et des centaines de kilomètres de galeries. Suivez la guide le long des murs suintants de sel, entre œuvres minérales et créations artistiques humaines, de chapelles en reconstitutions historiques de la vie des mineurs et des saints qui les inspiraient.
La fierté et la piété des Polonais est palpable jusque dans les tréfonds de ces mines royales qui racontent aussi l’histoire de la Pologne sur une dizaine de siècles. Finalement, même si on n’apprécie pas ce genre de tourisme souterrain, les informations données par la guide sont en soi une excellente introduction à la destination.
Un guide en chair et en os
D’ailleurs, encore une fois, nous recommandons de conseiller aux clients un vrai guide humain plutôt qu’une application sur un smartphone. Le lendemain, Monika nous fera découvrir sa ville en n’évitant pas les indispensables mais aussi en divulguant de précieux conseils comme de privilégier le tram au taxi, « des margoulins ». Sans compter son statut de coupe-file qui se révèle presqu’indispensable sur les lieux fort courus. Ce qui signifie qu’il faut aussi rappeler aux clients la nécessité de réserver les visites de sites importants dont les horaires sont modifiés régulièrement sans prévenir – avec ou sans guide.
Pour autant, une fois dans la place, tout est plutôt bien organisé et on sent que Cracovie profite bien de son statut de place-forte du patrimoine de l’Unesco. Et, pour dépoussiérer son image raillée par la plus contemporaine Varsovie, elle fait preuve d’originalité. Ainsi, on peut visiter la mine Wieliczka déguisé en mineur, organiser un bal sous les lustres en cristal de sel ou un match de foot, réserver la chapelle pour un mariage ou un concert. Les enfants, les personnes à mobilité réduite et ceux qui affichent un âge avancé sont traités comme les anciens rois des lieux.
Le grenier historique de la Pologne
Dans la ville aussi, on sent l’envie de partager un passé glorieux et une culture riche. Le soleil brille sur le district de la Petite Pologne et on ne distingue pas vraiment les habitants des touristes – respectivement 1,5 millions et… 12 millions par an, dont 9 millions de Polonais. Demander son chemin peut donner lieu à de longs échanges en anglais approximatif. Sur certains bancs, des QR codes invitent à découvrir un morceau d’histoire de la ville ou un poème.
Au volant de leurs petits taxis électriques, les chauffeurs commentent avec ferveur l’histoire compliquée de leur pays « si noble », au point de faire des petits détours pour montrer leur église ou leur monument préférés. Sur les murs, les affiches des Jean, Pavel et Casimir, qui annoncent les élections proches, sont les mêmes noms que ceux célébrés sur les murs tapissés de cuir du château du Wawel et de sa cathédrale qui surplombent la Vistule, qu’on appelle la reine des rivières puisqu’elle traverse à la fois Varsovie, Cracovie et Gdansk.
Les étudiants pour dépoussiérer la ville
Cracovie est un condensé d’histoire, de la Pologne et de l’Europe. Artistes (une des plus grandes collections de peintres flamands dans le château), philosophes, scientifiques, rois, personnalités, universités, églises et édifices architecturaux qui balaient sans complexe gothique, baroque, renaissance et art-nouveau, tout respire le passé. En deux petits jours, pour sentir la ville, on ajoute aux visites programmées, la basilique Sainte-Marie, le quartier juif et celui des artistes de Kazimierz, le ghetto, l’usine d’Oskar Schindler puis, librement, les parcs et quelques artères emblématiques divisées en arrondissements comme à Paris.
Chaque coin de rue est un repère historique. Et ce sont les étudiants, 120.000 dont 40.000 intramuros, qui sont chargés de moderniser les quartiers. Venus de tous les coins du monde, les students animent la ville, de la place du Marché à la Nouvelle Place, à coups de petits bars modernes et de galeries d’art contemporain, en faisant oublier le zloty en faveur de l’euro pour payer les souvenirs et les gourmandises.
Lire aussi (dans notre prochaine newsletter) la deuxième partie sur l’avis des pros