Nous qui choisissons autant que faire se peut de mettre à l’honneur des coins de pays méconnus, des terroirs naturels authentiques, des paysages insolites, nous voici obligés de nous recentrer sur notre environnement direct. Mais au fil de promenades urbaines ou bucoliques, nous nous sommes laissés apprivoiser avec bonheur par Liège, notre ville. On vous emmène !
Un cachet campagnard
A quelques jets de pierre de la place du Marché et de l’hôtel de ville, s’étire un incroyable mélange d’habitations au cœur de jardins cachés, de hauts murs percés de portes closes ou grillagées ouvrant sur des terrasses herbeuses, le tout accroché au versant de la vallée, véritable paysage oblique à apprivoiser à la force des mollets. Les ruelles sont si abruptes qu’on y a taillé des escaliers, des thiers dit-on à Liège, qui permettent de relier les coteaux de la Citadelle au cœur de la cité.
Autrefois les botteresses y descendaient chaque jour avec leurs cargaisons de fruits et de légumes frais. Aujourd’hui, de nombreux vergers et potagers ont été abandonnés, les talus trop raides ne permettant pas aux voitures d’y accéder. Le vieux faubourg perché sur la crête des Coteaux a laissé la nature reprendre ses droits.
Les ronces ont grignoté les vieux murs, les bois ont envahi la colline et l’esplanade St-Léonard est couronnée d’une épaisse verdure qui accueille des promeneurs sur des sentiers ombragés qui débouchent sur des prairies où paissent quelques moutons et plus haut encore sur le site de la Citadelle dont on aperçoit encore quelques murailles.
L’ancienne fortification a été occupée par les Allemands durant la dernière guerre qui transforment le bloc en prison. Plusieurs résistants y seront exécutés.
Si l’ensemble de la caserne a été détruite pour y construire le centre hospitalier actuel, un monument commémoratif a été créé autour du dernier poteau d’exécution d’origine cerné de quelque 400 croix portant toutes outre un nom et une date la mention « fusillé par les Allemands ».
L’Enclos des fusillés mérite le détour pour se souvenir de ces résistants morts pour notre liberté mais aussi pour la quiétude qui règne sur le site ombragé par de vieux arbres où nichent des oiseaux, seuls habitants des lieux.
Pour s’offrir une vue imprenable sur la cité et son fleuve, il faut prendre un peu de hauteur et gravir les 374 marches des escaliers de Bueren. Mais il n’est pas nécessaire de monter si haut pour profiter des coteaux et de leur charme. Une promenade balisée qui porte le nom de « Sentier des coteaux » permet de découvrir un monde clos et paisible où les pépiements des oiseaux l’emportent sur les rumeurs assourdies du centre de la ville.
Au-delà de l’impasse des Ursulines, une porte étroite percée dans un haut mur de briques découvre le sentier qui longe, sous les frondaisons, les jardins des maisons perchées au-dessus de la cour des Mineurs.
Plus loin, à nos pieds, l’ancien palais des Prince-Evêques déploie ses immenses toitures d’ardoises et aligne ses deux cours intérieures.
Des petits escaliers aux marches de pierre lissées par les ans, des patios et des vieux murs sertis de glycines, des portes basses qu’il faut pousser, des ruelles agrestes, des cours cachées, la tour des Vieux Joncs qui rappelle la présence à Liège d’une maison de l’ordre teutonique, la cour des Minimes, véritable enclos ombragé de marronniers, autant de lieux qui respirent une atmosphère hors du temps et qui racontent la campagne à la ville.
L’escapade s’achève en rue Pierreuse, sur l’ancienne Porterie de ce qui fut le couvent des Minimes. Rue populeuse et cosmopolite dont les habitations ouvrent leurs portes dès que le temps le permet.
Les trottoirs, même étroits, sont envahis par les jeux des enfants, des séances de bricolage et des barbecues qui attirent les voisins pour de longues conversations, assis sur le seuil de leur maison. Une fois de plus on se croirait dans un village insolite, suspendu au-dessus du centre de Liège et complètement indifférent à l’agitation qui y règne.
Enfin, comme Liège est encaissée dans une vallée, il faut aussi découvrir les buttes de la rive droite, plus confidentielles et pourtant tout aussi bucoliques. Le quartier d’Amercoeur est dominé par les ruines aux allures de manoir hanté du fort de la Chartreuse construit par les Hollandais au début du 19ème siècle.
Avant cela, le site appartenait à un monastère de moines chartreux qui s’y développe au Moyen-Age mais le site fut saccagé comme d’autres abbayes par les troupes révolutionnaires françaises.
Démilitarisé en 1981, l’ancien domaine militaire de la Chartreuse se laisse envahir peu à peu par la nature et il faudra attendre 1991 pour que la ville de Liège, actuelle propriétaire de cette vaste zone verte, en fasse un site classé.
Pour le plus grand plaisir des promeneurs qui en s’offrant une incursion dans cette forêt mystérieuse emprunteront des sentiers entre de hautes futaies bavardes du chant des oiseaux, découvriront des nouveaux points de vue panoramiques sur la Cité ardente et surtout se sentiront au cœur d’un surprenant poumon vert roboratif si proche de la ville pourtant.
Texte : Christiane Goor Photos : Charles Mahaux
A lire ou relire : Escapades à Liège, notre ville (1)
Infos pratiques : Outre le site de l’office du tourisme de la ville www.visitezliege.be/ il existe un petit guide inspirant, Liège à pied, réalisé par 3 Liégeois qui font découvrir la Cité ardente à travers 7 parcours originaux voire insolites. Pensez aussi à la butte de Cointe qui offre des vues panoramiques sur la ville et la silhouette futuriste de sa gare signée par Calatrava ou encore au quartier du Laveu dont les habitants forment une petite communauté encore plus soudée depuis le confinement au point que l’expression « vive les voisins » prend ici tout son sens.
excellente article Merci beaucoup