Eric Georges a fait toute sa carrière au Club Med. De retour depuis cinq ans sur sa terre natale belge, en tant que CEO Benelux, il a débuté comme GO Tennis, puis occupé les fonctions de Chef de sports, Chef de village, directeur des opérations, du commercial et du marketing. Peu connaissent aussi bien que lui l’univers et l’environnement du numéro un mondial des clubs de vacances. Interview.
Comment se porte la marque au Trident dans cette période post-Covid ?
Eric Georges : L’ensemble de nos resorts ont été fermés pendant la pandémie. Nous avons connu 18 mois pratiquement sans chiffre d’affaires. Mais je pense que nous avons plutôt mieux géré la crise que d’autres, car nous connaissons bien nos clients, nombre d’entre eux sont très fidèles. Et nous avons su garder le lien avec nos partenaires de la distribution pendant ces mois difficiles. Bref, nous avons bien rebondi.
Aujourd’hui, les résultats sont très bons aussi bien en Amérique du Nord que du Sud. L’Europe aussi donne satisfaction. Seul le continent asiatique reste frileux, même si l’on peut se rendre dans nos très nombreux resorts de Bali et Phuket en passant par la Malaisie. Nos 67 clubs ont rouvert, bien qu’ils ne le soient pas tous en même temps, pour des questions de saisonnalité. Je pense notamment à nos resorts de montagne.
Quid de l’activité en Belgique et au Luxembourg ? Quel bilan peut-on déjà dresser des ventes de l’année 2022 ? Et quelles sont vos projections pour 2023 ?
E.G : 2022 est une très bonne année pour le Bélux, avec une croissance à deux chiffres par rapport à 2019. Le second semestre – qui inclut les vacances d’automne et de Noël – est notamment en forte progression par rapport aux mêmes six mois de 2019. Pour le premier semestre 2023, nos réservations sont à l’étale par rapport à 2022 qui était déjà une meilleure année que 2019. Malgré la conjoncture, et les réservations plus tardives, on voit bien que les vacances restent un moment important, qu’il ne faut pas rater. Je note toutefois quelques changements à la marge. Les nouvelles dates de congés de Pâques par exemple, plus tardives côté francophone, devraient favoriser plutôt les vacances au soleil qu’à la montagne.
Comment expliquez-vous vos bons résultats de 2022 ?
E.G : Nous sommes restés en permanence en contact avec nos clients et partenaires. Ensuite le comportement du client a évolué. Il a souhaité voyager davantage localement. On a très bien vendu le ski l’hiver dernier et notamment les Alpes françaises où on peut se rendre facilement en voiture. A partir de mai dernier, nous avons commercialisé davantage de local européen, l’Espagne, la France et l’Italie. Nous avons également continué à vendre du long-courrier, mais plutôt des destinations ayant peu fermé pendant la pandémie telle la République dominicaine. En revanche, nous n’avons pratiquement pas vendu l’Asie.
Nous avons bénéficié aussi de ce qu’on appelle le “revenge travel”, l’envie des gens de re-voyager, de se reconnecter entre eux, de se retrouver en famille. On a profité également de reports de voyages prévus en 2020. Nous avons par ailleurs accueilli une nouvelle clientèle qui a trouvé que nous avions bien géré la crise.
Qu’en est-il de votre montée en gamme…
Elle est pratiquement terminée. Aujourd’hui, 95% de nos offres correspondent à du 4 tridents et du Exclusive Collection. Le prix moyen a mécaniquement augmenté du fait de l’évolution du mix-produit. De plus, les gens sont partis davantage en famille, ce qui explique aussi la hausse du panier moyen. Dans le même temps, nous faisons valoir les atouts du “all-inclusive” et des prix garantis.
Constatez-vous une différence entre les clientèles francophone et néerlandophone ?
E.G : Je rappellerais d’abord que seuls 30% des clients du Club sont français. Pour nous, il est clair que le marché francophone est beaucoup plus mature que le marché néerlandophone, de l’ordre de 80/20. Nous voulons élargir le marché flamand, il représente une vraie opportunité de croissance. Et notre montée en gamme va aider à le développer. Je constate d’ailleurs que les Flamands optent davantage que les autres pour les Exclusive Collection. Mais l’on sait également qu’il ne sera jamais à parité avec le marché francophone, lequel est extrêmement fidèle. Et nous entendons encore le faire progresser.
Qu’en est-il de votre offre montagne ?
E.G : Un tiers de nos villages sont situés à la montagne, une quinzaine en France, trois en Suisse, deux au Japon, un en Italie et un au Canada. Sur notre marché belge, la montagne représente la moitié de notre activité en hiver. En été, sa part est bien moindre. Nous ouvrons sept villages, uniquement en juillet et août. Mais nous la vendons de mieux en mieux, nos resorts deviennent de plus en plus trendy. La montagne, pendant la pandémie, avait le mérite d’être assez proche, facilement accessible en voiture, d’offrir de multiples activités dans ses grands espaces. Et elle est un peu moins chère que la mer. Ces atouts demeurent aujourd’hui.
Et vous étoffez votre offre à la montagne cet hiver…
E.G : En effet. Le nouveau Club Med Tignes remplace cette fin d’année l’ancien club repris par Belambra. A Val d’Isère, notre ancien 4 Tridents a été rénové et devient notre premier Exclusive Collection à la montagne. Le Club Med Pragelato, dans les Alpes italiennes, va pour sa part ouvrir une extension cet hiver. Enfin, nous ouvrons un troisième resort de montagne au Japon ces jours-ci, le Club Med Kiroro Peak, à Hokkaido.
Quid des autres ouvertures et rénovations, en dehors de la montagne ?
E.G : Nous avons ouvert le Magna Marbella cet été, un retour aux sources : nous avions quitté l’Espagne vingt ans plus tôt, dans ce pays où nous avions ouvert notre premier village dans les années cinquante, aux Baléares. Notre voilier Club Med II fait également l’objet d’une vaste rénovation actuellement. Nous avons rénové aussi La Plantation d’Albion, à l’île Maurice, et le riad de La Palmeraie à Marrakech. Et nous avons beaucoup d’autres constructions et de rénovations dans les cartons.
L’offre du Club Med ne cesse d’évoluer…
E.G : Nous avons toujours été pionnier dans l’innovation des villages de vacances, de la restauration à l’approche familiale via les mini-clubs. Parmi nos nouveaux produits, on peut citer le mini-club Med +, un nouveau concept à base d’éducation positive pour les enfants. Sur le long-terme, notre grande évolution c’est bien sûr notre montée en gamme. Exclusive Collection représente désormais 15% de notre offre, même si notre core-business reste bien sûr l’offre premium 4 Tridents.
Qu’en est-il de la distribution du Club Med en Belgique ?
E.G : Nous privilégions une approche omni-canal. Le client doit pouvoir réserver où il veut et quand il veut. La part des ventes directes est de 55%. Nous disposons en propre de quatre agences de voyages, à Bruxelles, Uccle, Liège et Anvers. Et nous avons une franchise à Namur. Pour les 45% de ventes indirectes, nous travaillons beaucoup avec des agences indépendantes. Nous concentrons surtout nos efforts sur notre Top 60, de véritables agences partenaires, celles qui nous vendent bien. Quinze d’entre elles ont notamment créé un corner Club Med dans leurs points de vente. Les résultats sont remarquables. Nous nous appuyons notamment sur le concept pour nous développer en Flandre. Quand je suis arrivé, nous avions deux corners. Aujourd’hui, notre objectif est clairement de les multiplier.
Quid de la partie transport ?
E.G : Beaucoup de nos clients privilégient la voiture, surtout pour aller à la montagne. Sur les destinations soleil notamment, nous travaillons avec toutes les grandes compagnies aériennes, de TUI Belgium à Brussels Airlines.
Le Club Med joue aussi la carte du MICE…
E.G : Oui en effet, il est très intéressant pour nous de recevoir cette clientèle notamment sur les inter-saisons. Certains de nos villages sont très bien équipés pour accueillir des séminaires, tels Opio, Marbella et Marrakech. Mais j’insisterais plutôt sur la qualité de notre offre pour accueillir des événements incentive, sur l’avantage que nous avons de pouvoir proposer l’ensemble des prestations sur un seul et même lieu, avec le support d’une équipe dédiée. Sur le marché belge – mais c’est aussi valable dans les autres pays – le MICE est reparti un peu plus tard que le loisir. Mais nous devrions nous rapprocher cette année des résultats de 2019.
Le Club Med a pris les problématiques RSE à bras le corps…
E.G : L’approche écolo est dans nos gênes. On l’a toujours été, de manière évidente et sans trop qu’on se penche dessus. Nos villages ont été construits dans la nature. Ceux que nous construisons sont tous certifiés Breeam, avec des critères précis. Et d’ici la fin de cette année, la totalité de nos clubs seront certifiés Green Globe, avec là encore des contraintes strictes. Ces deux certifications sont le signe d’un engagement fort.