La France, première destination touristique mondiale, veut aussi rester l’une des plus agréables à visiter. L’Alliance France Tourisme vient ainsi de publier une étude sur le surtourisme qui a reçu un grand écho médiatique dans l’Hexagone ce week-end. Une étude dans laquelle ce groupement d’entreprises du secteur du tourisme – représentant 1 million de salariés – a dévoilé une série de recommandations pour résoudre ce problème, en mettant notamment l’accent sur la réservation avant visite. Hasard du calendrier ? Le gouvernement français a présenté ce dimanche un plan pour remédier à la surfréquentation des sites touristiques.
“Surtourisme », « hypertourisme », « overtourisme », « tourismophobie »… Les termes ne manquent pas pour décrire les phénomènes de saturation de certains sites touristiques, une surfréquentation qui suscite un rejet des populations locales à l’égard d’une activité jugée plus négative que positive sur leur quotidien. On a pu ainsi voir de nombreux reportages ces dernières années sur le phénomène, dans le monde entier, de Rome à Barcelone en passant par Dubrovnik et Amsterdam.
La France est loin d’être épargnée. Etretat et ses falaises, surmergées par les visiteurs, ont ainsi fait partie des dix endroits au monde qu’il faut vraiment éviter en 2023, d’après le guide Fodor’s. Les îles de Bréhat et de Porquerolles, saturées elles aussi, ont instauré des quotas pour limiter l’afflux pendant l’été. Idem pour la calanque de Sugiton où il faudra réserver pour la seconde année consécutive pour s’y rendre cet été. Dans cette liste loin d’être exhaustive, on peut y ajouter les “plus beaux villages de France” qui attirent eux aussi beaucoup trop de visiteurs et mettent en place des jauges, comme à Saint-Guilhem-le-Désert…
Développer de nouveaux itinéraires, recourir aux réservations et billetteries, dissuader les touristes en cas de forte affluence…: l’Alliance France Tourisme s’attaque donc au « surtourisme », dans un rapport qui propose quelques pistes de réflexion (voir ses 10 recommandations ci-dessous).
« La prise de conscience française est tardive« , estime en préamblule de son rapport ce groupe de réflexion qui réunit des acteurs majeurs du secteur tels qu’Accor, Belambra, SNCF Connect ou la Compagnie des Alpes. Tardive mais bien réelle, comme en témoigne le plan dévoilé ce dimanche par le gouvernement français pour tenter de mieux réguler les flux touristiques. Lequel a d’abord tenu à rappeler, en préambule, que 80 % de l’activité touristique se concentre sur 20 % du territoire français.
Une campagne de communication nationale et le recours aux influenceurs doivent permettre de mieux répartir les flux touristiques dans le temps et l’espace. Une plateforme numérique développée par Atout France sera lancée au premier semestre 2024, avec des outils pratiques pour venir en aide aux professionnels du secteur. Un observatoire national sera créé, qui visera à centraliser les informations des différents sites touchés par le sur-tourisme.
Voici les 10 recommandations publiées in-extenso par l’Alliance France Tourisme (synthèse) :
« 1. Adapter la gouvernance des politiques publiques touristiques dans une approche fédératrice, participative et inclusive. Encourager la création au sein de chaque destination touristique de structures dédiées pour assurer le dialogue entre les autorités locales, les professionnels et les habitants sur les impacts du développement touristique et les solutions possibles.
2. Adopter une régulation locale et nationale respectant le modèle français d’un tourisme pour tous et la « capacité de charge » de la destination à la faveur d’une utilisation accrue des mégadonnées et des nouvelles technologies, des outils de suivi modernes de ces flux touristiques.
- Déployer des stratégies au plus près des territoires, fondées sur une méthodologie de prospective. Celles-ci devront faire l’objet d’une coordination nationale. Des indicateurs quantitatifs et qualitatifs mesureront globalement l’impact du tourisme pour la destination et sa population. Déconcentrer les flux et structurer une offre globale de services intégrée dans les territoires au bénéfice des populations locales.
4. Repenser la répartition des flux dans l’espace : « étendre le territoire touristique », en développant de nouveaux itinéraires ou lieux de visite touristique dotés d’un positionnement territorial fort, l’offre d’hébergement-restauration, en renforçant l’offre globale de services de la destination visitée et en accélérant la transformation des mobilités et de la connectivité.
5. Multiplier les parcours clients en améliorant la segmentation et le ciblage de clientèles touristiques ou en encourageant plus fortement le recours aux nouvelles technologies, dont l’augmentation de réalité afin d’offrir aux voyageurs une expérience informative plus riche.
6. Créer des expériences touristiques qui profitent à la fois aux populations locales et aux touristes -offres expérientielles et évènementielles- et aider les habitants à se réapproprier des lieux touristiques en leur accordant des entrées gratuites, des tarifs réduits ou préférentiels, des permis spéciaux ou des laissez-passer d’accès pour certains lieux de visite. Mieux répartir les flux touristiques dans le temps et désaisonnaliser le tourisme
7. Optimiser la répartition des flux dans le temps en lissant la fréquentation touristique d’une destination ou d’un site, en promouvant les expériences et activités touristiques durant l’inter-saison, en créant des événements ou activités hors saison ou en adaptant mieux la tarification à la fréquentation des lieux pour favoriser la visite pendant les périodes creuses « désaisonnaliser le tourisme ».
8. Mettre en place un organe de réflexion et de concertation entre l’Éducation nationale et la filière touristique sur la question des dates de vacances scolaires pour envisager une coordination optimale de cette période entre scolarité et saisonnalité, pour une meilleure prévisibilité économique et une plus grande sécurité juridique, à la faveur des entrepreneurs et investisseurs. Sensibiliser les habitants aux avantages du développement des activités touristiques et les touristes aux impacts du tourisme sur le territoire
9. Renforcer l’acceptabilité des communautés d’accueil : la filière touristique et les autorités publiques devront fournir un effort conséquent de communication pour éveiller les consciences aux avantages économiques sociaux et culturels générés par l’activité touristique.
10. Sensibiliser les touristes, les réseaux sociaux et leurs acteurs aux impacts du surtourisme ainsi qu’aux traditions locales et réglementations par des campagnes de communication, des chartes de bonne conduite ou le développement d’un tourisme réflexif. »