Alors que le tourisme égyptien remontait la pente, notamment grâce à de nouvelles activités, l’attentat contre les Coptes vient marquer un nouveau coup d’arrêt à cette progression. Dernier fait en date: des restrictions supplémentaires sur l’alcool.
Récente amélioration
Depuis fin 2016, les chiffres du tourisme s’étaient améliorés. En janvier dernier encore, la situation était bien meilleure que les années précédentes. Mais la hausse des arrivées était surtout le fait de touristes chinois, japonais et ukrainiens, les Occidentaux restant encore prudents. L’Egypte s’est donc davantage tournée vers ces marchés émergents.
Quoi qu’il en soit, les chiffres étaient meilleurs. En mars, les arrivées de touristes ont augmenté de 49%. Cette amélioration concernait surtout le tourisme culturel (Le Caire, Louxor, Assouan).
Au mois de mai, la découverte « sans précédent » par des archéologues de 17 momies dans la province de Minya a facilité la relance du tourisme culturel. Dès lors, cela fait partie de la stratégie des autorités, qui ont multiplié les annonces de découvertes ces derniers mois.
Un patrimoine chrétien…
Si ces récentes découvertes illustrent l’époque gréco-romaine, on apprenait hier encore que l’Égypte a retracé le chemin que la famille de Jésus-Christ a emprunté pour se rendre dans le pays depuis Bethléem, toujours pour relancer le tourisme.
Il faut dire que le voyage de trois ans effectué par Jésus-Marie-Joseph a été imité par 520 touristes de 20 pays différents. De quoi séduire les Chrétiens, alors ?
… et des Coptes pris pour cible
Le formidable patrimoine égyptien a beau attirer les Chrétiens, la persécution des Coptes – plus grande minorité chrétienne d’Égypte – par les islamistes et l’incapacité du gouvernement du Général al-Sisi à assurer leur sécurité ont, en revanche, de quoi les rebuter.
En avril déjà, deux églises avaient été attaquées par des fidèles de l’état islamique, faisant 44 morts et plus de 120 blessés. Depuis, la France et la Belgique appellent à une « vigilance accrue ».
Il y a quelques jours, des assaillants ont attaqué un bus qui conduisait des passagers coptes au monastère de Saint-Samuel, dans la province de Minya, attisant la souffrance des chrétiens d’Égypte, mais aussi les inquiétudes des Occidentaux.
Et maintenant, sus à l’alcool
À l’occasion des festivités musulmanes, un nouvel ordre a été émis de fermer toutes les boîtes de nuit, les bars et les magasins d’alcool égyptiens. Nous sommes certes en période de Ramadan, mais est-il bien utile d’interdire l’accès à l’alcool à ceux qui n’ont pas décidé d’en boire ? Quid des autres ?
Le plus surprenant, c’est que c’est le directeur général du tourisme égyptien Ashraf Ezz al-Arab qui a délivré cet ordre, à l’occasion de la veille de la nuit de Mid-Shaaban, qui appelle les musulmans à jeûner.
Selon al-Arab, la décision 222 du Ministère du tourisme datée de 2012 stipule que quiconque pris à boire de l’alcool pendant cette période est susceptible d’être emprisonné. En réalité, ce risque ne concerne que les vendeurs, et pas les consommateurs. Par ailleurs, difficile de déterminer si cette interdiction épargne les étrangers.
Seuls les hôtels 5 étoiles avaient la possibilité de servir de l’alcool, et uniquement via le room-service. Les égyptiens favorables à l’application de la loi islamique considèrent cette mesure comme hypocrite, car pourquoi limiter l’interdiction de l’alcool au seul mois du Ramadan, et pas clairement pour les étrangers de surcroît ?
Les professionnels du tourisme, en revanche, s’inquiètent de ce type de mesures, qui vont bien entendu à l’encontre de leurs intérêts.
Le problème sécuritaire n’est pas loin, puisque cette interdiction a par le passé, motivé et « justifié » le meurtre de ceux qui vendent de l’alcool par des extrémistes.
Tourisme halal only ?
Le Sheikh Sharif al-Hawari, salafiste influent en Egypte, a pour sa part appelé le pays à développer des infrastructures pour le tourisme halal, par exemple en établissant des lieux strictement réservés aux femmes et en interdisant l’alcool tout au long de l’année, arguant que ce type de tourisme générerait des revenus significatifs.
Comme si les professionnels n’étaient pas assez en difficulté, le précédent sous-secrétaire au Ministère du tourisme, Magdy Salim, a précisé que cette interdiction pendant les fêtes mènerait à la fermeture de tout établissement concerné (hôtel compris) qui ne la respecterait pas, assorti de 6 mois de prison.