Pourquoi ne pas se laisser tenter par la magie de l’hiver québécois ? Oubliées, les heures passées sur les autoroutes pour atteindre des stations de montagne encombrées ou encore à faire la file pour emprunter les remonte-pentes ! Au Québec, on ne se sent jamais à l’étroit dans ces vastes territoires noyés de neige de novembre à avril.
Exemple avec La Gaspésie, dont le nom signifie «bout de la terre» en langue amérindienne, dessinée par une longue péninsule qui baigne dans le golfe du St-Laurent. Pays de mer et de montagnes aux panoramas grandioses, la région ne laisse personne indifférent.
L’hiver, la neige décore le pays à grands coups de pinceaux blancs, saupoudrant de sucre glace les épinettes et les branches dénudées des bouleaux. Les jours raccourcissent, les nuits prennent de l’ampleur, les repères s’effacent, on ne sait plus où finit la mer, où commence la terre. Paradis idyllique pour celui qui est en quête de défi, de convivialité et de solitude.
La saison froide se déguste au grand air, il faut faire confiance aux Québécois qui ont appris à apprivoiser l’hiver et à développer un art de vivre à la fois rude et chaleureux qui revigore leur belle humeur.
Plaisirs de glisse
Les fervents de ski nordique, de courte ou de longue randonnée, trouveront leur bonheur dans le parc national de la Gaspésie dont le réseau de sentiers balisés transporte les plus courageux au-delà des nuages. L’imposante muraille des Chic-Chocs, véritable épine dorsale du parc, culmine avec le mont Albert qui domine la vallée du haut de ses 1154 mètres. Bien emmitouflés, les fondeurs se lancent à l’assaut des chemins enneigés.
Bientôt les arbres se raréfient et la forêt boréale s’efface devant la toundra arctique, refuge d’une harde de caribous. Magie de l’effort récompensé, car tracer sa route sur la neige, debout sur des skis et en peinant sur ses bâtons, c’est une merveilleuse manière de se mesurer face à la démesure du paysage gaspésien. Au retour dans l’unique logement en dur du parc, le Gîte du Mont Albert accueille les randonneurs auprès d’un grand feu ouvert dont la chaleur douce a tôt fait de balayer les fatigues de la course.
Si les monts Chic-Chocs sont le paradis de la poudreuse et des beaux paysages à découvrir d’en haut, d’autres sites appellent les fondeurs tentés par une sortie moins sportive. Dans le Bas St-Laurent, à l’entrée de la péninsule gaspésienne, le parc national du Bic propose un monde de caps, de falaises et de grèves rocheuses figées par le froid.
La nature se partage entre des forêts bâillonnées par la neige, des marécages saisis par la glace et lisses comme des miroirs et des prairies transformées en vastes champs de neige. Après une longue balade au cœur de cette solitude blanche, pourquoi ne pas oser passer une nuit insolite dans un «quinzee», un refuge de neige gelée à la manière d’un igloo, à l’affût du grand silence ouaté qui enveloppe l’abri ? Une expérience écologique, sans doute moyennement confortable, mais elle laisse des souvenirs impérissables.
Nettement plus cosy, le centre de villégiature de Pohénégamook Santé Plein Air établi sur la rive d’un lac aux eaux profondes rivalise d’imagination dans son offre touristique hivernale. Fondeurs, motoneigistes, patineurs, amoureux de la voile à ski ou de glissades en bouées, tous se retrouvent chaque jour à arpenter le lac gelé, attentifs au monstre qui y vivrait s’il faut en croire la légende.
Ses premières apparitions sont signalées dès le 19ème siècle, il aurait l’apparence d’un canot retourné recouvert d’écailles. D’aucuns pensent qu’il s’agit plutôt d’un esturgeon échappé d’un bassin d’élevage, d’autres sont certains que ce n’est qu’un gros poisson d’avril alimenté par les histoires des pêcheurs… La fameuse bête du lac est cependant devenue la mascotte du centre.
Les vedettes incontournables du site sont les hardes de cerfs de Virginie qui vivent à proximité. L’hiver est une période difficile pour les cervidés car les couches de neige épaisses les épuisent en exigeant une grande dépense d’énergie pour accéder à leur nourriture. C’est pourquoi ils se rassemblent dans des forêts de conifères en limitant leurs déplacements dans une zone où la neige tassée leur permet de circuler plus facilement.
Chaque jour, à la tombée de la nuit, la vie du centre s’interrompt, suspendue à un souffle dans l’attente des cervidés gourmands qui se déplacent furtivement, se cachant derrière les troncs des arbres pour se confondre avec le paysage. Rassurés par le silence, ils s’aventurent alors vers les auges qu’un guide a chargées de granulés pour le plus grand plaisir des vacanciers.
La pêche blanche
Autre plaisir du pêcheur qui creuse des trous dans la glace qui a figé les lacs. Assis sur un tabouret de fortune, il plante au bord de chaque trou une tige en forme de Y, comme une fronde d’enfant qui retient une canne à pêche.
Quand celle-ci bascule, c’est que le poisson a mordu. Ailleurs, sur la batture gelée à hauteur de Rimouski, les pêcheurs s’abritent dans des petites cabanes en bois qu’ils déplacent au gré de leur pêche.
Une longue faille taillée dans le plancher permet d’immerger plusieurs lignes prêtes à l’emploi. Chaque week-end, des familles entières débarquent et la pêche devient un joyeux prétexte pour satisfaire un sens inné de la fête.
D’une cabane à l’autre, surchauffée par des poêles à bois, on se visite, on se rencontre, on se congratule, surtout quand on parvient à faire un coup double en ferrant aux hameçons deux poissons à la fois.
Étrange pays où on marche sur l’eau quatre mois par an et où on ne sait plus où finit le lac et où commence la terre. Un pays où l’espace et le temps font la part belle à l’imagination.
L’hiver au quart de tour
Durant l’hiver, tout devient prétexte à inventer mille sports et jeux de neige. Les raquettes autrefois utilisées par les amérindiens pour se déplacer dans la neige, permettent de fouler l’épaisse couche de poudre immaculée. Mis à part le crissement soyeux des raquettes sur la surface, seul le sifflement du vent dans les épinettes rivalise avec le silence.
Le scooter des neiges est une autre expérience. Inventé au Québec en 1942, il est l’orgueil de l’industrie québécoise et personne n’imagine vivre l’hiver à la campagne sans ce fabuleux engin qui offre aux aventuriers la possibilité de découvrir des sites inaccessibles en voiture durant l’été.
Chacun enfile une chaude combinaison, des moufles, des bottes et un casque intégral avant d’enfourcher sa bécane rutilante. En file indienne, les ski-doo se coulent entre les arbres et filent à vive allure sur des sentiers balisés mais parfois, il faut baisser la tête pour se glisser sous des tunnels de branches alourdies par le poids de la neige fraîche.
Quand la piste s’engage sur une côte abrupte, la chenille des machines mord dans la neige et soulève un nuage de poudreuse en s’élançant vers les sommets. De là-haut le panorama des forêts profondes encadrant des petits lacs immaculés s’offre d’un seul tenant.
Les moteurs grondent, déchirant le silence matinal, les chenillettes mordent la neige projetant derrière elles des éclats de glace. Très vite chacun a pris la mesure de sa machine : tenir son cap, chasser dans les virages, épouser les mouvements du ski-doo, mettre les gaz en montée, … Au fil des kilomètres, la conduite devient plus sportive. Quand on lève le nez du guidon, la nature fait son cinéma.
C’est que l’hiver pèse sur la forêt, il s’insère jusqu’au cœur des épinettes dont les pieds sont ensevelis sous une épaisse couche de neige. Les rivières ont ralenti leur course et les lacs gelés étirent leur toile, uniformément blanche. Parfois, dans la poudreuse, surgissent des traces d’animaux qui se perdent dans les sous-bois.
De lacs en sous-bois, les ski-doo ont tracé quarante kilomètres de piste. Les scooters slaloment encore longtemps dans les forêts de bouleaux et de conifères. Avec le jour qui décline, le froid s’intensifie et la lumière s’est étalée en une gerbe dorée qui allongent les ombres. Sous la lueur des phares, les reflets de la neige hypnotisent le regard qui s’engourdit. Soudain, au détour du sentier, une tache lumineuse déchire les pans de brume qui noient peu à peu le chemin. L’appel du chalet en bois rond est irrésistible.
Chacun accélère et c’est en éventail que les motoneiges glissent vers ce carré de lumière rayonnante. Rêve de bûches qui crépitent dans l’âtre, d’un verre d’alcool de caribou, doré et rugueux sur la langue, d’une soirée conviviale bercée par les accents rocailleux du pays. Ivre de grands espaces, le voyageur s’en retournera, de la neige et des émotions plein la tête.
Infos pratiques
Deux sites incontournables: www.quebecoriginal.com et www.quebecmaritime.ca.
Se loger: Chaque parc offre des possibilités de logement comme le Gîte du Mont Albert dans le parc de Gaspésie, réputé pour sa table gastronomique, ou encore ailleurs des petites cabanes, des tentes-roulottes, des yourtes qui permettent d’admirer le ciel étoilé depuis le dôme de la voûte (www.sepaq.com).
Eric et Chantal offrent la possibilité de séjourner dans la plus grosse auberge en bois rond dans l’Est du Québec et de goûter aux plaisirs de l’hiver dans la Forêt de Maître Corbeau www.quebecmaritime.ca/domainevalga. Autre cadre naturel exceptionnel pour le Pohénégamook Santé Plein Air, proche d’un ravage www.quebecmaritime.ca/santepleinair.
Les activités : Chaque centre vous fournira le matériel nécessaire à la pratique des activités hivernales. Retenez que pour louer un ski-doo il faut avoir 21 ans, présenter un permis de conduire et une carte de crédit pour la caution. Tout l’équipement est fourni par le loueur de votre randonnée, ceci n’exclut pas des sous-vêtements chauds, une cagoule, des gants en soie et des lunettes.