Probablement l’État de plus éphémère du monde: son indépendance a duré… 1 jour ! Nous sommes le 15 mars 1939, sous les collines volcaniques des Carpates : les premiers coups de feu de la guerre viennent d’être tirés ! Dans l’histoire, cette première bataille est connue sous le nom de bataille de Krasen Pole: elle opposait les quelques pauvres forces ruthènes à l’armée hongroise, les premiers tentant de résister sur le pont de la Tisza, affluent du Danube.
Les patriotes ruthènes se composaient de quelques jeunes hommes déterminés, rejoints par des lycéens et leurs professeurs, la plupart armés de fusil de chasse. Ils défendaient le pont qui menait à Khoust, la ville où le matin même une nouvelle république avait été créée, sous l’égide d’un évêque catholique en pleine région orthodoxe, passionné de langue grecque antique, protecteur de la culture et de la langue ruthène.
L’indépendance est proclamée, la Ruthénie sort du giron tchécoslovaque dans lequel elle avait été incluse en 1918. Le soir du même jour, l’empire nazi avait déjà mis fin à la République. Et en 1945, les Russes occupent toute l’Europe de l’Est, y compris évidemment la Ruthénie : ils arrêtent son président qui mourra peu après dans une prison de Moscou. Cependant, à l’heure actuelle, ce territoire inclus dans l’Ukraine recommence à revendiquer l’autodétermination des Ruthènes.
Le Ruthène d’origine le plus connu est l’acteur américain Charles Bronson, dont les parents avaient émigré depuis la Ruthénie. Et puis, vous connaissez peut-être la tribu gauloise des Ruthènes, qui occupait l’actuel département de l’Aveyron. Simple homophonie ? Pas sûr… On sait que les tribus celtes venaient d’Europe de l’Est, et ont pour la plupart conservé leur nom tribal primitif.
Aujourd’hui, les Ruthènes forment une vraie diaspora : on trouve des minorités en Serbie et Croatie (les Slavons), en Pologne, en Hongrie, mais surtout en Slovaquie où ils forment 20% de la population. Sans compter la forte émigration vers les Etats-Unis et le Canada. La langue ruthène est intermédiaire entre le Slovaque et l’Ukrainien, et d’ailleurs considérée par l’Ukraine comme un simple dialecte.
Disons-le clairement : ce petit territoire (1/3 de la Belgique) n’est pas vraiment une destination touristique. Cependant, pour les originaux à la recherche de destinations bizarres, ils peuvent dans un rayon de 100 km accéder à 5 pays différents, tous frontaliers de la Ruthénie : la Pologne, la Slovaquie, la Hongrie, la Roumanie et l’Ukraine.