Au milieu de l’Espagne et du côté de la frontière portugaise, la région d’Estrémadure (Extremadure) est reconnue pour sa nature et ses grands espaces préservés. Depuis quelques années, cette région aux ciels les plus purs d’Europe joue également la carte des étoiles…
Une présentation qui se tenait au Parlement européen* avait comme interlocuteur Francisco Martín Simón, directeur général du Tourisme Estrémadure.
Ou pourrait l’appeler « astramadure »…
Quand on pense Estrémadure, on pense aux villes de Cáceres, Mérida, Medellin, Badajoz, Trujillo… Moins connues que les grandes stars historiques du pays, elles sont également riches d’un patrimoine datant déjà de la préhistoire (nombreuses grottes dont celles de Fuentes de León) ou de la période romaine (amphithéâtres, arènes et aqueducs, notamment d’Emerita Augusta ou pont romain sur le Guadiana). Quelques cités racontent ensuite l’aventure et le souvenir des Conquistadores comme Pizarro, Cortès ou de Orellana, explorateur de l’Amazonie. Mais cette région en marge du grand tourisme est également connue, et reconnue, pour ses observations ornithologiques et ses parcs nationaux comme celui de Monfragüe et autres vallées frontalières du Tage qui dressent leurs falaises où abondent de nombreuses espèces d’oiseaux rares (aigles, faucons, vautours et gypaètes, cigognes noires, pics) tandis que les paysages secs et les champs caillouteux de l’arrière-pays offrent l’observation de nombreuses autres espèces plus discrètes mais tout aussi intéressantes. Lesquelles voient migrer les amateurs, professionnels, clubs et spécialistes de toute l’Europe.
A cela s’ajoute depuis quelques années un atout de taille : la pureté des ciels (air sec et sans lumière artificielle ni pollution lumineuse. Ajoutons les excellentes conditions climatiques et environnementales qui permettent également de mieux profiter de ces sites nantis de points d’observations et de sentiers d’observation (légèrement éclairés par la faible lumière emmagasinée la journée). Quant à la pureté du ciel, elle est garantie par des cahiers des charges qui donnent des labels comme le projet européen STARS4ALL dont l’objectif est de conscientiser le public en termes de pollution lumineuse (laquelle a un impact sur les animaux sauvages, l’énergie, la durabilité, etc.) et qui est mesurée par des capteurs ‘photomètres TESS’. Ajoutons les sites certifiés Starlight (projet européen qui encourage le tourisme astronomique et notamment le maintien de sites préservés).
« Estramadura, buenas noches », tout un programme
On pourrait le traduire par « Bonne(s) nuit(s) Estrémadure »… Cet ambitieux programme implique des collaborations entre les provinces et les municipalités ainsi que les réseaux de développement rural, sans oublier de nombreuses associations, notamment d’astronomie. Le tout dans le but de conserver, maintenir et promouvoir la beauté des sites naturels dédiés à l’observation des étoiles. Cette démarche très originale a déjà débuté il y a quelques années mais se renforce grâce à la volonté des autorités locales qui sont fières de la réussite et de la mise en place de nombreux projets.
Francisco Martín Simón, directeur général du Tourisme Estrémadure : « L’observation des étoiles s’ajoute notamment à l’ornithologie qui fait partie de notre patrimoine depuis plus de 20 ans. Il s’agit bien plus qu’une simple démarche touristique, car c’est également une stratégie commerciale tous azimuts ainsi qu’une volonté de faire profiter les touristes et amateurs des beautés de ce fabuleux patrimoine naturel offert par l’Estrémadure. Une belle sélection de sites et de possibilités pour des expériences extraordinaires permettent l’observation de la voûte céleste. Nous avons un héritage naturel complété par plus de 60 zones protégées le long de 1500 kilomètres de sentiers qui parcourent la région. Nous proposons également des petits chemins à parcourir la nuit (ndlr : un total de 6, les « senderos nocturnos ») qui disposent d’une illumination très douce qui permet la balade nocturne. Tout est signalisé et sans contamination lumineuse.
Très important également, nous avons formé et sollicitons des guides touristiques spécialisés en astronomie et dans le milieu nocturne. Ils interprètent la nuit pour le grand public ainsi que tous les différents éléments qui la composent (sons, bruits, cris furtifs des animaux, odeurs de la végétation…). Parfois, la soirée se termine avec des dégustations de produits locaux et petit verre de vin ou de cava… L’objectif est également que les personnes qui restent sur le territoire pour profiter de l’astrotourisme peuvent également compter sur l’agrotourisme et l’hôtellerie ainsi que sur des infrastructures comme el Anillo (ndlr : récemment inauguré, il s’agit d’un Centre international et un engagement envers un modèle de développement durable basé sur la création de projets et d’initiatives innovantes dans le domaine du sport, de la culture et du « tourisme nature » ainsi que des loisirs et du temps libre, encadrés dans la stratégie de développement touristique « Estrémadure 2030 ».
El anillo est un bâtiment en forme d’anneau (ndlr : lequel servira également au MICE pour des congrès, des réunions, etc.). Franciso Martin Simón conclut : « Nous allons également renforcer la démarche « sans lumière » tout au long de la frontière avec le Portugal et avec l’aide de l’Europe (notamment grâce aux fonds européens…) Nous avons actuellement plusieurs endroits certificés Starlight (ndlr : par l’UNESCO, l’UNWTO et l’Union internationale d’Astronomie), à savoir le parc national Monfragüe, le lac Alqueva, les régions de las Hurdes.
« Quand le soleil se couche et que la nuit tombe, l’Estrémadure se réveille… »
Ce slogan résume bien la démarche des passionnés d’étoiles. Chaque soir, télescopes, jumelles et lunettes astronomiques commencent leur voyage intersidéral. Les guides expliquent aux novices les merveilles du ciel. Ajoutons les visites classiques en journée, une hôtellerie diversifiée et coopérante, des infrastructures et des guides, des sites et des facilités d’utilisation (ndlr : c’est toujours l’Europe et en ce qui concerne le matériel d’observation, pas de tracasseries ni de stress contrairement à certains pays du Maghreb quant à l’utilisation de son propre matériel d’astronomie parfois conséquent…). Bref, toutes les conditions sont réunies pour des voyages à travers les ciels étoilés d’Estrémadure tels qu’ils se présentaient dans nos contrées il y a cent ans avec la voie lactée et des étoiles brillantes… à donner le vertige !
L’exposition et la présentation se tenaient au Parlement européen à Bruxelles. Si l’idée semble bonne, elle est assez rédhibitoire dans la mesure où il fallait une invitation et un pass émis par les institutions pour accéder au mini planétarium installé dans le salon « area » du bâtiment Altiero Spinelli au cœur de cette tour de Babel huppée autant qu’hyper sécurisée. L’idéal aurait été de faire cette communication dans un centre culturel ou un autre lieu, plus facile d’accès, autant pour la presse que pour le grand public. Mais finalement, l’intérêt n’est-il pas de se rendre réellement en Estrémadure. Et y vivre cette expérience magnifique où l’on ne peut que souhaiter de «Bonnes nuits».
En savoir plus
. https://extremadurabuenasnoches.com/en/
. www.stars4all.eu