La ville nouvelle d’Almere construite en 1976 sur un polder du Flevoland a rapidement connu un boum démographique au point d’atteindre quelque 213000 habitants en 2020, ce qui s’explique entre autres par sa proximité avec Amsterdam, à une trentaine de km, une ville devenue trop chère pour y vivre ou trop fréquentée par les touristes car elle offre les avantages d’une capitale « no stress » sans les inconvénients au point de pouvoir s’y sentir comme dans un gros village.
Alors Almere, ville dortoir ? Peut-être si l’on s’en tient à l’affluence dans le centre de la ville pendant la journée et en semaine. Il faudrait pouvoir y vivre durant le week-end pour répondre à cette question. Il semble toutefois que les Amstellodamois qui ont choisi de s’y installer apprécient entre autres un décor nettement plus contemporain et la rareté des canaux !
Petit historique
Jadis la Zuiderzee (ou mer du Sud) dessinait un ancien golfe peu profond qui pénétrait sur une centaine de km à l’intérieur des terres dans le centre-nord du pays. Mais lorsque les tempêtes ont poussé l’eau de la mer du Nord, le Zuiderzee a connu des inondations dévastatrices et souvent meurtrières.
La grande crue de janvier 1916 soutenue pendant plusieurs jours par des vents violents a détruit plusieurs digues et dévasté de nombreuses régions. C’est alors que le gouvernement entreprit au lendemain de la première guerre de fermer et d’assécher la Zuiderzee. Tout a commencé par la construction de l’Afsluitdijk, une digue « de fermeture » de 32 km de long et de 90 m de large, entre la Hollande septentrionale et la Frise, terminée en 1932.
La poldérisation de la Zuiderzee pouvait commencer et le Flevoland est ainsi la 12ème et plus jeune province des Pays-Bas créée en 1986 par la réunion de plusieurs polders sur la zone orientale de l’ancienne mer. Almere s’est créée sur la zone sud de la province dévolue à l’agriculture au départ mais la pauvreté de la rentabilité agraire et les besoins fonciers de l’agglomération d’Amsterdam ont encouragé le projet de la création d’un espace résidentiel réparti sur différents quartiers.
Une ville en harmonie avec l’eau
Aujourd’hui Almere occupe une surface de 250 km2 qui reposent entre 2 et 5 mètres sous le niveau de la mer et l’eau représente la moitié de sa surface. Le littoral de la ville s’étend sur 42 km et on y trouve 9 plages de sable, de quoi séduire les amateurs de plage mais aussi de sports nautiques. Le vent décoiffant attire les surfeurs et kitesurfeurs.
Nous n’avons pas eu le temps de découvrir d’autres quartiers que le centre de Almere bien que les autres districts soient facilement joignables par train, Almere étant desservie par 6 gares sur la ligne qui mène à Amsterdam. Toutefois la seule découverte du centre de la ville montre que son espace urbain n’est pas ordinaire.
Un musée d’architecture à ciel ouvert
En 1994, l’OMA (Office for Metropolitan Architecture), l’agence de l’urbaniste néerlandais Rem Koolhaas a été désignée pour créer le développement urbain pour le centre-ville. Celui-ci a pu faire appel à d’autres bureaux d’architecture aux créations emblématiques. Ensemble ils ont créé des « quality teams », à savoir des cercles d’architectes, d’urbanistes, de sociologues, de paysagistes pour examiner, inventer, réorienter éventuellement les projets.
Ces réflexions ont abouti à un programme de construction de 66000 m2 de commerces, 2500 places de parking, 930 logements, une bibliothèque, un théâtre, un musée et un casino.
Par ailleurs pour densifier au maximum la ville ils ont superposé plusieurs niveaux et pour éviter que celle-ci soit trop verticale, ils ont créé du relief au point qu’un quartier de Almere porte le nom insolite de Citadelle. Par exemple le centre commercial conçu par le français Christian de Portzamparc est au cœur de ce dispositif avec sur un même espace un parking éclairé en jour naturel, des rues piétonnes, des boutiques du centre commercial et quelque 45 maisons de ville qui donnent sur les toitures engazonnées des commerces.
En flânant le long de l’eau, on ne peut manquer le robuste édifice Siverline des architectes néerlandais Klaus en Kaan, avec un revêtement en aluminium qui scintille les jours ensoleillés et s’embrase au coucher du soleil. Ou encore le théâtre tout en transparence qui semble flotter sur le lac de la Weerwater, une œuvre des architectes japonais du studio SANAA. Un autre étonnant complexe résidentiel appelé The Wave dessiné par l’architecte néerlandais René van Zuuk s’inspire d’une vague se jetant dans la mer.
Le centre d’Almere a aussi sa jolie petite plage au bord de l’esplanade sur laquelle débouche la principale rue commerçante, une immense place publique au traitement minéral qui descend en pente douce vers le sable et le lac. Un quai y a été installé pour abriter les navettes électriques qui traversent le Weerwater.
Le centre-ville d’Almere qui, comme à Amsterdam, s’ouvre au pied de la gare fait-il rêver le touriste d’un jour ? Ville essentiellement piétonne puisque les voitures sont toujours dirigées vers un parking et seules deux allées accueillent des bus, on apprécie d’y flâner tout en ayant très vite l’impression d’être au cœur d’un vaste mall, si nombreux sont les commerces spécialisés et les boutiques de mode (quelque 400) sans oublier son Kinépolis.
Fort heureusement des places comme celle du Marché offre de quoi se restaurer dans des décors confortables de divans et de coussins mais on se sent aussi très vite coincé dans une vaste salle de restauration ou de bar selon l’heure.
Finalement, même si au fil de la balade, nous avons aussi traversé des quartiers plus paisibles, emprunté des chemins ombragés, croisé de nombreux vélos qui trouvent ici des pistes à deux voies, on se sent quelque peu perdu dans un décor qui semble avoir banni tout ce qui a fait notre architecture séculaire.
Infos : www.visitalmere.com Le bureau de tourisme se trouve au bout de la rue principale juste avant la place du Forum. Vous y trouverez des brochures diverses dont l’Architectural Tour qui permet d’accompagner une découverte des créations contemporaines de cette ville.
On peut y louer également une visite guidée. Ne pas hésiter à pénétrer dans la bibliothèque impressionnante par sa taille, sa luminosité et l’accès aisé aux livres et autres manuels ou DVD. Atypique dans une ville atypique, où tout se découvre par univers thématiques avec un mobilier qui met en musique l’espace et les usages de manière fluide au point qu’on se sent plus proche d’une grande surface culturelle que d’une bibliothèque traditionnelle. Y manger : sur la Grote Markt, le Grand Café Le Baron où on a testé les spares ribs et les brochettes, tendres à souhait et accompagnés de sauces dignes de ce nom, pour un excellent rapport qualité-prix. Une visite incontournable d’une journée au moins, la Floriade Expo 2022 incontournable d’ici le 9 octobre, accessible par la navette électrique sur la Weerwater ou par un shuttle de couleur verte au départ de la gare d’Almere Centrum https://floriade.com |