Les plateformes de réservation ne savent plus quoi inventer pour attirer le chaland et se substituer à tout prix aux agences de voyage et aux professionnels du tourisme, dont elles n’ont ni la pratique ni la culture.
Ainsi, à côté des hébergements, Booking investit de plus en plus les autres segments du voyage : vols, forfaits, location de voitures, taxis aéroports, … Les vols redirigent les internautes vers le comparateur Kayak, la location de voitures vers Rentalcars — deux marques sœurs — et l’agence en ligne lastminute propose ses forfaits en partenariat : les rubriques en tête de sa page d’accueil ressemblent de plus en plus à s’y méprendre à celles d’une agence de voyages en ligne.
Ce n’est pas tout : le groupe vient d’annoncer le rachat de FareHarbor, un fournisseur de logiciels de réservation d’activités locales. Il veut ainsi permettre aux « tour-opérateurs et attractions locales d’apporter facilement leurs activités sur le web ». Car « aujourd’hui, les voyages sont alimentés par la technologie, mais le marché des expériences et des activités locales est encore largement déconnecté », constate Gillian Tans, PDG de Booking.com.
Vous avez dit « expérience » ?
Pour la direction de Booking.com, l’objectif est aussi et surtout de fournir plus d’expériences — l’expression est à la mode — aux voyageurs. On ne saurait non plus se départir de l’idée que cette acquisition est aussi la réponse du berger à la bergère, Airbnb, qui poursuit sa diversification en proposant désormais de multiples activités et « expériences ». La plateforme en proposerait déjà 5.000 dans 60 destinations, qui se limitent surtout, en fait, à des promenades urbaines ou en forêt, à pied ou à vélo, au mieux, à des cours de yoga.
Ainsi, après les grandes villes américaines, l’offre d’Airbnb à Montréal ne compte que des promenades-découvertes, de 14 à 33 € pp., dont une visite (en anglais !) du marché Atwater suivie d’un brunch, et à un « cours de photo » argentique au cours d’une promenade d’une heure et demie (38 € pp.), à l’issue de laquelle on ne pourra guère encore se prendre pour Henri Cartier-Bresson…
Airbnb fait encore le malin
Airbnb étend à présent son concept à la France entière. Après Paris et la Provence l’année dernière, plus de 700 expériences seraient désormais disponibles, notamment à Bordeaux et Lyon, et ce sont les cours de cuisine — on n’en sera pas surpris — qui rencontrent le plus de succès. Là non plus, pas de quoi rivaliser avec Thierry Marx.
En fait, ce qu’Airbnb propose, ce n’est rien de plus qu’un catalogue d’activités à la portée de tout le monde, qui n’ont d’intérêt que de se dérouler à l’étranger, où elles sont d’ailleurs généralement proposées par les offices de tourisme locaux. Car pour apprendre la cuisine italienne, la photo, la mécanique auto ou le tricot, il existe quantité de clubs et associations qui le proposent, à deux pas de chez vous. Rien à voir avec l’« expérience » que procure un séjour dans une tribu indienne, un vrai stage de vol à voile ou de conduite sur glace qui, à eux seuls, justifient le voyage.
… mais connaît la musique
L’année dernière, Airbnb avait lancé son offre « Music Experiences » dans le cadre de sa plateforme globale Trips. Depuis lors, la musique est rapidement devenue l’une des catégories de réservation les plus populaires d’Airbnb, avec environ 100 concerts organisés chaque mois dans le monde entier. Devant ce succès, la plateforme vient de lancer « Airbnb Concerts », une offre d’événements musicaux « intimistes » dans des lieux non conventionnels. Avec des musiciens « uberisés », on peut craindre le pire. Pourtant, Airbnb prévoit d’atteindre20.000 concerts par mois d’ici la fin de l’année. Difficile d’être plus présomptueux…