C’est dans la prestigieuse Salle du Trône du Palais des Académies de Bruxelles que s’est tenue récemment une importante journée d’études dont le but, outre sa revalorisation scientifique et historique, était de convaincre la tutelle de classer, en l’état, les salles du Musée de l’Armée.
Il faut savoir que si les bâtiments du Cinquantenaire sont classés, le contenu et l’aménagement intérieur ne le sont pas !
Tout qui visite ce musée reste frappé par la richesse des collections, mais plus encore par la quantité incroyable d’objets, d’armes, d’uniformes, de tableaux, de drapeaux dont quelques-uns « pris à l’ennemi ! » etc. qui s’y trouvent. On parle surtout des deux salles principales (salle historique et salle technique),
Certains ne voient ici qu’un bric-à-brac ringard qui n’a plus rien à voir avec la muséologie actuelle et ne doit donc pas être conservé en tant que tel… Grave erreur !
Cette accumulation de type encyclopédique, dont le développement débute dans les années 20, témoigne de l’histoire des musées européens. Elle représente en réalité un style particulier, conservé de manière exceptionnelle. On rencontre sous la célèbre arcade des éléments historiques jusque dans les vitrines, témoignage précieux de l’ébénisterie belge de l’entre-deux-guerres.
Experts belges et étrangers se sont succédé derrière le micro pour confirmer la richesse qui est ici à préserver
François Mairesse, professeur de muséologie à la Sorbonne, pour n’en citer qu’un, a sans doute le mieux souligné que nous tenons un patrimoine unique, mais aussi une atmosphère, une ambiance qui le sont tout autant.
À Bruxelles, qui plus est, il existe des précédents de classement de mobilier intérieur. (Pour ne citer que la brasserie le Cirio, à la Bourse, ou la Maison Van Buuren à Uccle). Bref, il est essentiel de poser un regard nouveau sur ces anciens aménagements qui proposent une plongée dans un « musée dans le musée », reflet de l’esprit et de l’idéologie d’une époque.
Le lieu irradie, pour la plus grande joie des visiteurs, une atmosphère remarquable et étonnante
Et les choses avaient bien commencé, par une première en Belgique donc: le classement des salles d’expositions du musée il y a quelques années. Malheureusement, cette procédure de classement, initiée par le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale, est contestée par la nouvelle direction du musée auprès du Conseil d’Etat. Laquelle direction (intégrée au nouveau War Heritage Institute !) souhaite démanteler ces salles emblématiques au profit d’une scénographie dite moderne, autrement dit avec un risque de saccage (voir de partage communautaire…)!
Les organisateurs de la journée ont eu la bonne idée de donner aussi la parole aux habitants du quartier et aux visiteurs fidèles, dont la petite-fille de Louis Leconte, créateur du musée. Il faut savoir que plus de 17.500 personnes ont signé une pétition pour sauver le musée, ses collections et son ambiance.
Bref, les conclusions de la journée ont été formalisées dans un mémorandum remis au Ministre de Défense pour le convaincre de l’importance qu’il y a à sauver ce patrimoine unique et ce qu’il nous raconte sur notre histoire.
Le colloque était organisé par l’asbl « Art & Heritance » et animé par l’historien de l’art et numismate Jacques Toussaint.
Christian Vanderwinnen