Voyages d’affaires : une «étude» du WES bien peu crédible

Le bureau d’études Wes research & strategy, qui réalise traditionnellement les études annuelles sur les départs en voyage et les comportements des clients des membres de l’ABTO, vient aussi de se pencher sur les voyages d’affaires réalisés par les Belges. Et c’est du grand n’importe quoi !

On apprend ainsi que le secteur représenterait 13,32 millions de voyages d’affaires par an au total. Soit 6,66 millions d’allers et retours : autant dire que chaque adulte belge, en moyenne, partirait chaque année au moins une fois en voyage « d’affaires ». Dans la pratique, bien sûr, il n’en est rien.

Tout ça ne tient pas debout

Il ne faudrait pas pour autant s’imaginer que le voyage d’affaires est nécessairement lointain, et onéreux. D’abord, nous dit le bureau Wes, plus de la moitié des voyages d’affaires des Belges sont réalisés dans leur propre pays (6,88 millions d’allers-retours, donc).

Mais peut-on parler de « voyage » dans un pays où le plus long trajet en train n’excède guère quatre heures ? Y a-t-il tellement de cadres commerciaux qui couchent à Liège ou à Anvers plutôt que de rentrer chez eux le soir même, à Waterloo ? A moins que les chiffres n’incluent les « navetteurs » … Rien de tout cela ne tient debout. Mais le pire reste à venir.

2,8 milliards d’euros en Belgique

Si l’on en croit le bureau WES, avec un coût moyen par voyage de 126 €, le voyage d’affaires représenterait annuellement plus d’un milliard d’euros. Il concernerait donc… timthumb (2)4,36 millions de Belges en Belgique ! Logement, transport et … shopping représenteraient ainsi une manne de 2,8 milliards d’euros, rien que dans le pays, contre 1,9 milliard dans le reste du monde !

En revanche, un voyage d’affaires à l’étranger, qui durerait en moyenne 2,7 jours « selon la destination » — on s’en serait douté — coûterait, toujours en moyenne, 296 €, la France étant la destination étrangère la plus importante (12,9%), suivie par l’Allemagne (8 %),  les Pays-Bas (6,9 %) et la Grande-Bretagne (3,3 %).

Moins de 110 € par jour ? Allons !

Il faudra qu’on nous explique comment on peut séjourner 2,7 jours en France, en Allemagne ou ailleurs pour 109,63 euros par jour, transports et restaurants inclus… Chacun sait qu’un aller-retour en Thalys coûte au bas mot 150 euros, et même pas en première classe, et qu’on ne trouve aucun hôtel digne de ce nom à moins de 120 euros la nuit en région parisienne, par exemple.

Enfin, si on accepte les chiffres sur lesquels se base le WES, 80 % des voyages d’affaires concerneraient donc la Belgique et les pays limitrophes. Les 20 % restants concernent le reste de l’Europe, majoritairement, et un peu les Etats-Unis, l’Afrique et l’Asie, et les coûts de voyage et de séjour y sont de nature à faire grimper les moyennes.

On aurait aimé…

Bref, cette « étude » du WES, c’est du grand n’importe quoi. On aurait plutôt aimé savoir, et c’eût été autrement plus intéressant et plus crédible, quelles étaient les destinations « business » les plus fréquentées, en train ou en avion, quel était le coût moyen consacré à voyages-dafairesune chambre d’hôtel, un restaurant, etc.

Il suffisait pour cela d’interroger les compagnies aériennes et les chaînes hôtelières, les trois plus grandes agences spécialisées et celles en ligne, les trois grands GDS et l’association des Travel Managers, qui tous offrent des logiciels spécialisés de gestion des frais de voyage.

On se serait sans doute aperçu que la plupart des voyages d’affaires, c’est le déplacement annuel d’un patron de PME à la principale foire de son secteur, et qu’il descend dans un petit hôtel familial où il a ses habitudes. Mais que tout cela coûte quand même plusieurs billets de cent euros… Et que les globe-trotters qui partent un mois visiter leurs filiales en ne volant qu’en First et ne descendant que dans des palaces, ne constituent qu’une infime minorité.

Une crédibilité en cause

En d’autres termes, il y a sûrement moins de voyages d’affaires qu’on ne le dit, mais ils coûtent bien plus cher qu’on ne le croit. On a parfois regardé avec scepticisme les chiffres publiés par le WES à la demande de l’ABTO. Mais quel stagiaire, cette fois, a compilé les données aussi bêtement, sans se poser la moindre question ?

Un tel ramassis d’âneries n’est pas de nature à crédibiliser le bureau flamand, pourtant l’un des seuls à étudier le secteur du voyage, d’affaires ou d’agrément.

 

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