Le sujet est débattu depuis de longues années, en Suisse comme ailleurs partout en Europe. Agences de voyages et tour-opérateurs réclament en effet, mais sans succès à ce jour, un fonds de garantie couvrant les (multiples) défaillances des airlines.
Dans une interview accordée à L’Echo touristique, Eric Drésin (secrétaire générale de l’Association des agents de voyages et TO européens, ECTAA) estime que l’on pourrait s’inspirer du modèle danois. La Commission européenne réfléchit en effet à l’évolution de la directive sur les voyages à forfait.
«La Commission s’apprête à démarrer une consultation publique, afin d’évaluer s’il est nécessaire d’entreprendre une réforme de la directive. La consultation pourrait durer six semaines. Ensuite, si une révision est envisagée, elle pourrait ainsi intervenir en 2024», explique Eric Drésin. Une réforme que l’ECTAA juge urgente, la fameuse loi sur les voyages à forfait étant rapidement devenue obsolète, en Suisse comme ailleurs.
«Ce qui nous soucie de plus en plus, c’est la protection contre l’insolvabilité des fournisseurs, et en particulier des compagnies aériennes. Avec la crise, nous recevons un nombre croissant de notifications de suspension de compagnies du BSP, de la part de l’IATA. Ce qui signifie que nous devons arrêter d’émettre des billets d’avion sur ces transporteurs en difficulté. Depuis le 2 décembre 2021, nous avons eu des notifications pour Air Sinai en Israël, Ego Airways en Italie, Belavia en Biélorussie, Aerobell en Amérique centrale, Blue Panorama en Italie. Cela questionne, alors même que nous ne sommes pas dans une phase de reprise intensive», poursuit le secrétaire général.
Le modèle danois
Mais se protéger contre l’insolvabilité des airlines n’est guère chose aisée. «Un système de protection contre la faillite des compagnies existe déjà au Danemark, depuis plusieurs années. Un fonds de garantie «droit des passagers» a été créé sur le modèle du fonds qui existait déjà pour les voyages à forfait. Les passagers se voient prélever de 0,30 euro par billet, pour toutes les compagnies qui décollent et atterrissent au Danemark. Cela alimente un fonds qui est plafonné: lorsqu’il atteint un certain montant, le prélèvement est stoppé. Le modèle est tout à fait transposable au niveau européen. Il faudrait alors le même mécanisme applicable partout au même moment, ce qui s’avèrerait toutefois assez compliqué. La création de fonds de garantie nationaux serait sans doute plus facile. Le modèle a été mis en œuvre par le Danemark. Mais il pourrait tout à fait être mis en œuvre par d’autres pays comme la France.»
Et Eric Drésin de préciser que le modèle danois est actuellement le seul de l’Union européenne pour protéger les clients contre la faillite des compagnies aériennes. «Les Pays-Bas ont lancé un projet, l’Allemagne y réfléchit. Au niveau de l’ECTAA, nous parlons de cet exemple danois depuis plus de 20 ans. Mon prédécesseur avait eu des échanges, en vue d’un fonds mondial. Mais les attentats du 11 septembre ont mis le projet au placard: les compagnies ont alors décidé de geler toutes les discussions.»
Des compagnies aériennes qui, aujourd’hui, ne voient pas d’un très bon œil le lancement d’un fonds de garantie. «Elles sont vent debout contre! Les compagnies disent que le système va créer un surcoût pour le client. Elles défendent leurs intérêts, avec efficacité pour l’instant.»
(DS)
Aperçu du modèle danois
Le fonds danois est né en 2015, en complément du fonds pour les forfaits créé en 1979. En 2020, il atteignait 13 millions d’euros, soit le montant maximal défini par la loi. Cette caisse de garantie couvre les voyageurs munis d’un billet de vol au départ du Danemark, de et vers une destination internationale. Le montant est de 0,30 euro par passager, versé aux autorités danoises.
Les voyageurs bloqués à l’étranger sont ainsi rapatriés par le fonds. Ceux censés partir après la faillite d’une compagnie seront remboursés de leur prépaiement après une déduction de 133 €/pax, si les fonds suffisent. Si les fonds sont insuffisants, le système prévoit une couverture proportionnelle.
Lorsque le fonds atteint 13 M€, aucun frais n’est collecté auprès des compagnies aériennes. S’il passe sous 10 millions, les contributions sont réactivées. S’il est inférieur à 3,5 millions, les frais passent à 0,60 euro, jusqu’à ce que le fonds soit reconstitué.
(Source: Danmarks Rejsebureau Forening).