Ce 10 novembre, une conférence s’est tenue au musée belge de la franc-maçonnerie (MBFM). L’occasion de revenir sur le travail de l’artiste symboliste : Jean Delville. Ce 09 décembre, la ville de Woluwe-Saint-Pierre organisera un colloque pour initier un parcours du symbolisme dans le grand Bruxelles. A ce jour, l’asbl arkadia et l’agence itinéraire organiseraient, seules, à notre connaissance, un circuit symboliste dans le centre bruxellois.
Le symbolisme, ce commun des mortels
En totale opposition avec le naturalisme, le symbolisme se veut hermétique. Au même titre qu’un opéra de Wagner ou qu’une poésie de Rimbaud, cette époque de l’histoire de l’art cultive ses secrets.
Pourtant, ce courant de la fin du XIXè siècle comporte son lot de stars incontestables. En poésie, les « décadents » sont archi connus : Verlaine, Rimbaud, Baudelaire ou Mallarmé sont les seuls poètes lus de la plupart de nos contemporains francophones. Certains d’entre eux ont d’ailleurs vécu de véritables passions à Bruxelles.
En peinture, les illustres représentants sont identifiables par tous : Munch, Klimt et Gauguin parlent au monde entier. Les sculpteurs tels Paul Dubois et Auguste Rodin (qui sculpta probablement le fronton de la bourse de Bruxelles) connaissent, eux aussi l’engouement du public.
La Belgique possède ses stars incontestables même si moins cotées à l’étranger. En poésie, nous aurons Emile Verhaeren et Maurice Maeterlinck. En peinture, Fernand Khnopff, Gustave van de Woestijne, James Ensor et Félicien Rops. Les passions humaines du sculpteur Jef Lambeaux font, elles aussi, partie des joyaux de la Capitale. La renommée de George Minne est universelle.
Delville, une personnalité oubliée
Si le MBFM organisait une conférence sur Delville ce 10 novembre, ce n’est pas seulement car l’artiste occupât jadis la fonction de vénérable Maître de la loge des « Amis philanthropes ». Ce n’est pas non plus parce que le symbolisme (en tant que tel) est la base du travail maçonnique. C’est surtout parce qu’un français passionné, Daniel Guéguen, a souhaité redonner vie à ce trublion belge de l’entre-deux siècles.
Delville était un personnage particulièrement brillant et touche à tout. Roi des emmerdeurs et pamphlétaire sans concessions, son travail se retrouve en France, aux USA et en Angleterre. En Belgique aussi évidemment mais le découvrir n’est pas toujours chose aisée. Dans une église du sud du pays, une toile est rendue invisible, parce que placée derrière un meuble. Au cinquantenaire, ses mosaïques sont occultées. Néanmoins, son célèbre Prométhée, dans un état de délabrement déplorable, trône vaille que vaille dans l’ancienne bibliothèque de l’ULB. S’il est également visible au Palais de justice de Bruxelles, des musées, tel celui de Bruges, le font connaître du public.
L’artiste, qui n’aimait ni les impressionnistes, ni le politique, était très proche d’Eugène Isaÿe et peut se vanter de jolies communications académiques. Bon nombre de ses élèves ont fait de brillantes carrières. Néanmoins, son caractère trop impulsif pour la scène belge, ses problèmes familiaux et de trop nombreux dons l’ont desservi. Ces derniers ont contribué à l’adage qui veut que : « ce qui est gratuit ne vaille rien ». Des œuvres monumentales et sombres, très loin des desiderata actuels, ont sans doute fini par lui assurer une exposition au niveau des caves ou des greniers.
Woluwe veut redonner vie au symbolisme
La capitale européenne regorge d’œuvres de cette époque. Du centre à Saint-Gilles en passant par Boitsfort et Etterbeek, un échevin de Woluwe Saint Pierre souhaite proposer un parcours du symbolisme à partir de sa commune. Caroline Persoons veut fédérer les acteurs du tourisme et de l’art autour de deux grandes réflexions. Si le premier évènement sera accessible au grand public, le second rendez-vous se voudra plus technique. Le 09 décembre, dès 15h00, les personnes intéressées sont invitées dans les bâtiments communaux dans le cadre d’un colloque.
Les acteurs professionnels seront, eux, conviés le 03 mars 2017.
A la suite de nombreux parcours tels celui consacré à la BD, à l’art déco ou à l’art nouveau, le circuit symboliste semble avoir toutes les chances de voir le jour l’année prochaine.
En symbolisme, la diversité des styles est telle qu’on parlera plus d’une école que d’un mouvement. Néanmoins, une chose se dégage indubitablement : Le symbolisme est l’art de l’impression et de la sensation. Jamais définissable, la notion se situe toujours entre deux mots, entre deux idées. L’expression artistique tente d’établir un lien entre le commun des mortels et un monde idéal et mystique. Un monde sacré et sensible où la théologie prend une place prépondérante. Un univers de jadis où des adversaires intellectuels en venaient aux mains pour un trait de pinceau.
Les troubles que nous connaissons actuellement semblent être de nature à remettre cet art-ci au goût du jour…
Quoi qu’il en soit, la mise en place d’un nouveau parcours qualitatif à Bruxelles est une initiative que nous accueillons avec beaucoup d’enthousiasme. Faire revenir les touristes dans la ville se fera aussi grâce à toutes ses initiatives, qui ne manquent pourtant pas.
Samuel
Jean Delville, la contre histoire de Daniel Guéguen, Editions Lienart.
Centre culturel de WSP : 02/773.05.81