La Normandie, éternelle source d’inspiration (1/2)

A Deauville, la prestigieuse boutique Hermès se trouve dans une architecture typiquement normande sur une place derrière le casino de style classique.

A croire que cette terre verte à souhait même en bordure de la mer soit propice à l’épanouissement des écrivains, peintres et autres artistes de renom! Pierre Corneille, Guy de Maupassant, Marcel Proust, Alphonse Allais, Gustave Flaubert, quelques noms de jadis dont je ne retiendrai que le dernier dont on célèbre cette année le bicentenaire de la mort, un prétexte comme un autre pour prendre la route des vacances en terre normande.

Quand Gustave Flaubert vient pour la première fois à Trouville, c’est en 1834 et il a 12 ans. La petite ville de moins de 3.000 habitants spécialisée dans la pêche à la sole, au maquereau et à la crevette grise n’était pas encore surnommée la « Reine des plages ». Les parents de Madame Flaubert possédaient le domaine de Géfosse, près de Pont-L’Evêque et Trouville était la plage la plus proche.

Le château cerné par son parc a certainement enflammé l’imagination de Emma.

Les deux seules auberges de la petite ville étaient appréciées par les plaisanciers. Gustave est un enfant renfermé qui se réfugie dans la rêverie et dans la lecture. Une cape qu’il ramasse un jour d’août 1836 sur la plage de Trouville va décider de sa vie.

Sa propriétaire en est Elisa Schlésinger, mère d’une petite fille et de 12 ans l’aînée du jeune homme âgé alors de 14 ans. Il lui rapporte la cape et est immédiatement saisi par un amour impossible et rêvé qui ne l’empêchera pas de participer avec elle à de joyeuses parties de bateau jusqu’à la fin de l’été.

Il écrira plus tard « J’étais immobile de stupeur comme si la Vénus était descendue de son piédestal et s’était mise à marcher. C’est que pour la première fois alors je sentais mon cœur, je sentais quelque chose de mystique, d’étrange, comme un sens nouveau … ». Même si elle inspirera en partie Flaubert dans son écriture, il ne parlera plus d’elle que comme du « fantôme de Trouville ».

A Trouville-sur-Mer et à Deauville sur les pas de Flaubert

Par contre Trouville n’a jamais oublié l’auteur qui revient dans la ville balnéaire très à la mode désormais au cours de l’été 1853 tandis qu’il travaillait sur Madame Bovary. Il décrit dans sa correspondance l’émotion suscitée par ce retour à Trouville « Tous mes souvenirs de la jeunesse crient sous mes pas, comme les coquilles de la plage (…) j’entends gronder les jours passés et se presser comme des flots toute l’interminable série des passions disparues. »

Impossible de ne pas voir cette statue de Flaubert, très élégant, érigée pour rappeler qu’il a séjourné à Trouville durant les étés de son adolescence.

Aujourd’hui une statue de Gustave Flaubert trône au bord de la Touques dont le cours dessine la frontière entre Trouville-sur-Mer et Deauville. Quant à l’hôtel Flaubert, le seul hôtel construit dans un style neo normand juste en face de la mer et au-dessus des Planches, son nom ne doit rien au hasard.

Son inspirateur, Fernand Moureaux, maire de Trouville-sur-Mer et homme d’affaires avisé savait que 1936, l’année des premiers congés payés, marquait le centenaire des vacances de Gustave Flaubert sur les bords de la Touques.

C’est lui encore qui, pour pallier à la concurrence rude avec Deauville, décide de modeler la réputation de Trouville-sur-Mer comme port de pêche traditionnel normand. Il transforme les façades sur le quai dans le style régionaliste et construit une nouvelle halle à poissons. Pari réussi, le port de pêche est devenu l’image de marque de la station balnéaire. Aujourd’hui encore, même les 1.200m de la promenade des Planches bordée de sable doré dévoile un bel échantillon de l’architecture balnéaire.

Les belles prises qui se retrouvent chaque jour sur les étals du marché aux poissons de Trouville-sur-Mer.

Par ailleurs le charme de la petite station provient aussi du dédale de ruelles pentues, d’impasses et de passages étroits longés de maisons à pans de bois entre quartiers de pêcheurs et ceux des boutiques et restaurants.

La marché aux poissons de Trouville-sur-Mer avec son architecture neo normande et ses tables de dégustation est le cœur battant de la station balnéaire.

Enfin, assister à marée haute au retour des chalutiers qui ramènent dans leurs filets des poissons et des crustacés que l’on retrouve ensuite sur les étals colorés du Marché aux Poissons est un plaisir qui ne lasse jamais les curieux et encore moins les gastronomes qui se régalent sur les bars à dégustation.

La promenade des Planches est particulièrement bon enfant à Trouville-sur-Mer.

Si la rive droite de la Touques accueille une cité balnéaire coquette, familiale et trépidante, il n’en va pas de même sur la rive gauche où s’étire la station huppée de Deauville, célèbre pour ses 643m de promenade mythique foulée depuis une centaine d’années par les stars et les têtes couronnées.

Pourtant en 1850 il n’y avait là que quelques fermes établies sur des pentes autour de l’église du village, surplombant des marais où paissaient vaches et moutons.

La plage de Trouville-sur-Mer est longée par une collection de villas qui rappellent la Belle Epoque.

Il fallut la passion pour le cheval du duc de Morny, demi-frère de Napoléon III, pour que change la physionomie des lieux. En 1861, il fit prolonger la ligne de chemin de fer Paris-Lisieux-Pont-l’Evêque jusqu’à la mer et entreprit en 1864 de faire construire un hippodrome qui draina les foules depuis Paris. Il n’en fallut pas plus pour que Deauville sorte des marais et que sa population soit multipliée par dix.

L’hôtel Le Normandy situé en plein centre de Deauville est un hôtel de caractère et de charme qui se veut un authentique hymne à l’architecture régionale avec ses colombages vert tendre et ses clochetons classés.

Le père de Flaubert possédait une des premières fermes, il ne l’exploitait pas mais la famille y venait de temps à autre faire de courts séjours auprès des paysans. Flaubert hérite de la ferme mais endetté il s’en sépare en 1875, à une époque où la station a commencé à se donner des airs chics. La ferme arrive dans les mains d’Henri de Rothschild qui y fit bâtir une imposante villa qui mêle le style traditionnel du pays d’Auge avec des extravagances balnéaires.

Sur deux kilomètres de plage, les 450 parasols de Deauville, colorés et photogéniques, séduisent depuis plus d’un siècle les artistes qui les peignent ou les photographient.

Rachetée en 1924 par un américain magnat de la presse, Ralph Strassburger, la villa élevée dans un parc verdoyant et devenue aujourd’hui la star des villas deauvillaises et se visite ; elle a conservé son mobilier d’époque, ses bibelots, ses tableaux de chevaux de course qui étaient la passion du propriétaire.

Dans l’arrière-pays normand sur les pas de Flaubert

Le pays d’Auge où vivait sa famille maternelle a marqué la vie de Gustave Flaubert, de son adolescence jusqu’à sa mort. Pont-L’Evêque et les villages aux alentours ont offert à l’auteur un espace de vie et d’inspiration. Les personnages et décors d’Un cœur simple évoquent des bouts de paysage, des débris du temps, des bribes de chagrin, des lambeaux de rêve, autant de sources dont l’auteur disposait dans l’accumulation de ses notations.

L’important n’est pas l’identification de tel lieu ou l’authenticité d’une image mais ce que la plume de l’auteur en a fait, nous plongeant à Pont-L’Evêque au cœur d’une ville qui a disparu au fil des guerres mais le plan d’ensemble n’a pas changé, une route rectiligne où s’ouvrent des ruelles, une petite ville scindée par deux ponts, un réseau de rivières, quelques façades en pans de bois…

La campagne cauchoise en Seine-Maritime autour du village de Tôtes a inspiré le lieu imaginaire de Tostes dans Madame Bovary, c’est ici qu’elle éprouvera ses premières désillusions auprès de son mari, découvrant la petitesse de son propre univers trop étroit pour ses aspirations.

Les terres du père de Gustave Flaubert se tenaient jusqu’aux abords du moulin de Vassonville. Le chemin emprunté semble tout tracé pour être l’itinéraire emprunté par Emma et Charles après leur noce pour rentrer à Tostes.

Autre décor dans la première partie du roman, la ferme d’Ordemare qui semble correspondre à la ferme achetée par le père de Gustave Flaubert à Saint-Sulpice-la-Pierre qui devient la ferme des Bertaux où Charles Bovary venu soigner le père Rouault fait la connaissance de sa fille Emma qu’il épousera. Une randonnée littéraire d’une douzaine de kilomètres au départ de l’église du village de Vassonville permet de suivre un itinéraire aménagé de panneaux d’interprétation qui plonge dans l’univers de la première partie du roman.

Bien sûr la géographie varie entre la fiction et le réel mais la rivière la Scie creuse bien son chemin dans la campagne et alimente un moulin qui voisinait la terre de la ferme, celle-ci est aujourd’hui un gîte rural mais quelques bêtes paissent encore dans les prairies où a survécu un four à pain.

Gustave Flaubert se révèle un artiste qui de sa plume peint comme avec un pinceau les lumières normandes. Le château de Bosmelet surprend dans cet itinéraire mais les jardins magnifiques qui l’entourent évoquent les rêves romanesques de Emma Bovary qui s’ennuie dans la vie morne de son couple et plus encore après la soirée à laquelle celui-ci sera invité au château du marquis d’Andervilliers, elle y prend la mesure de sa frustration.


Info

L’office de tourisme de Trouville situé sur les quais à deux pas du marché aux poissons est incontournable Site officiel du Tourisme à Trouville sur Mer, Côte Fleurie, Normandie

L’office du tourisme de Pont-L’Evêque entre Côte Fleurie et Terre d’Auge est une autre étape utile pour la mine d’informations qu’il peut distiller Office de Tourisme Terre d’Auge à Pont-l’Évêque (terredauge-tourisme.fr)

Une promenade littéraire Flaubert en pays d’Auge est organisée le 18 septembre avec un circuit en 3 étapes : Pont-L’Evêque où sont nées sa mère et sa grand-mère, Trouville-sur-Mer qu’il fréquente durant dix saisons et enfin Deauville où son père possédait une ferme dont Flaubert hérita. Une journée à suivre en bus.

Flaubert21 http://flaubert21.fr est la manifestation d’un projet public partagé par toutes les collectivités et autres institutions désireuses de rendre hommage à l’auteur normand et propose plus de 200 rendez-vous d’avril 2021 à juin 2022

Se loger : l’Hôtel Eden Park situé au bord du lac de Pont -L’Evêque, un havre de quiétude Eden Park hotel*** Restaurant – Pont l’Evêque – Normandie

Gastronomie : un séjour en France est toujours synonyme de bonnes tables. Nous avons testé le Bistrot Le Vivier à Trouville-sur-Mer situé face à la plage, juste au bord des Planches, un lieu parfait pour déguster des fruits de mer ou des poissons cuits a la plancha https://restaurantlevivier.com/ et aussi Le Rollon, une petite adresse bistronomique de Pont-L’Evêque où nous avons découvert une savoureuse côte de bœuf de race normande avec un écrasé de pommes de terre à huile de truffes, un délice www.restaurant-le-rollon-14.fr Bar à vin de surcroît.



 

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