Les États-Unis, pays du libéralisme, veulent imposer un impôt des sociétés minimum de 21% dans le monde entier. C’est une révolution idéologique.
Joe Biden m’étonne. Lui que Donald Trump aimait railler en le surnommant « sleepy Joe » ou « Joe l’endormi » montre qu’il a du tonus à revendre.
Alors que Barack Obama avait suscité pas mal d’attentes pour ne pas faire grande chose à l’arrivée, si ce n’est être un communicateur hors pair, Joe Biden, le président septuagénaire, épate les observateurs par ses prises de décision audacieuses.
La preuve ? En proposant d’augmenter l’impôt sur les sociétés américaines à 28%, il impose la plus importante hausse des impôts depuis… 1942 ! Augmenter l’impôt des sociétés en temps de paix, c’est une première aux Etats-Unis. C’est même un renversement d’idéologie à 180°.
Bien entendu, si Joe Biden souhaite augmenter l’impôt des sociétés, c’est qu’il a besoin de cet argent pour financer son plan de rénovation des infrastructures américaines de 2.200 milliards de dollars. Nos lecteurs qui ont déjà voyagé aux États-Unis ont pu constater que les ponts, routes, ports et aéroports avaient besoin d’un très sérieux coup de rénovation.
En Californie, l’État qui fait rêver le monde entier grâce à Hollywood et la Silicon Valley en est réduit à utiliser encore les 110 volts alors que même des pays pauvres d’Afrique sont passé aux 220 volts. Par charité chrétienne, je ne parle même pas du métro new-yorkais, pas digne d’un métro du tiers monde.
Au final, ce plan massif de 2.200 milliards de dollars ne se contentera pas d’éliminer les nids de poules des routes américaines, il permettra aussi de rehausser d’un mètre de hauteur certains ponts pour tenir compte du réchauffement climatique. Et comme si ces déclarations musclées ne suffisaient pas à son bonheur, Joe Biden a aussi annoncé, dans la foulée de son plan, l’établissement d’un impôt minimum mondial de 21%. Et tout cela sera proposé aux autres pays riches dans le cadre du G20 de la fin juin 2021. Demain donc!
Là encore, c’est dingue, ça fait plus de 20 ans que l’OCDE demande la même harmonisation fiscale, en vain. Mais voilà, l’augmentation de la dette publique suite aux conséquences du COVID et l’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche vont transformer ce vieux rêve de l’OCDE en réalité pour les uns et cauchemar pour les multinationales concernées, notamment les GAFAM habituées à ne rien payer nulle part.
Et en Europe, me direz-vous ?
Deux réactions à chaud si je puis l’écrire de la sorte. Premier constat, c’est une sale période pour les paradis fiscaux. « C’est un sale temps pour l’Irlande, les Pays-Bas et le Grand-Duché de Luxembourg » comme l’écrivait l’économiste Jean-Pisani Ferry. Pour l’heure, ce qui sauve ces passagers clandestins de la fiscalité internationale, c’est qu’en Europe, il faut respecter la règle de l’unanimité avant de modifier la fiscalité. L’impôt minimum européen n’est donc pas pour cet été.
Mais la pression des Américains va être terrible. Ils vendront cet impôt avec le mot « intérêt général » en bouche, mais « intérêt particulier » dans la tête. Car c’est clair, cet impôt minimum vise surtout les multinationales américaines et elles seront priées de payer cette obole chez l’Oncle Sam pas en Belgique ou en France!
Au vu de la frénésie actuelle de Joe Biden, il faudra se souvenir de se méfier des gens soi-disant endormis, les « sleepy Joe ». L’histoire nous l’avait déjà montré. Ne nous avait-on pas dit que Jean XXIII serait un pape de transition ? Au final, il aura été l’un des plus grands papes de l’histoire de la chrétienté.
Même discours à l’époque à l’encontre d’Helmut Kohl, l’ancien chancelier allemand, considéré par les médias et ses pairs comme un « gros balourd » ne devant pas rester dans les annales de l’histoire. Pourtant, c’est lui qui a été l’artisan de la réunification allemande et de la naissance de l’euro.
Et donc, oui, « sleepy Joe » risque aussi de nous étonner. Les réseaux sociaux se moquent de lui lorsqu’il avait raté la marche de son avion présidentiel. Il montre aujourd’hui que s’il n’a pas le jeu de jambe de James Brown, ses mains, elles, ne tremblent pas lorsqu’il s’agit de signer des plans d’envergure. Comme quoi la jeunesse n’est pas une question d’état civil mais d’état d’esprit.