Si l’objectif des auteurs du double attentat suicide de Tunis, jeudi dernier, était de provoquer un bain de sang, c’est raté : si on déplore un mort et plusieurs blessés à des degrés divers parmi les forces de police, on est loin du carnage espéré par les terroristes.
Si le but était de détourner les touristes de Tunisie et de casser ainsi le mouvement de retour des Européens sur les plages de Hammamet ou de Djerba, c’est encore raté : « Ces attentats n’auront pas de conséquences sur ce secteur clé de l’économie du pays », a assuré le ministre du Tourisme René Trabelsi (photo ci-dessous) à France 24. Et il a sans doute raison.
Le spectre de la violence
Car si l’attentat de l’avenue Bourguiba a fait ressurgir le spectre de la violence dans le pays, la sécurité s’est considérablement améliorée en Tunisie après la série d’attentats jihadistes qui avaient notamment visé des touristes en 2015, dans l’attaque contre le musée du Bardo, où 21 personnes ont été tuées, puis dans la station balnéaire de Sousse, qui a fait 38 morts.
Depuis lors, il y a eu le massacre du Bataclan à Paris et les attentats de Bruxelles, qui justifient encore aujourd’hui une présence militaire dans les deux capitales. On ne s’habitue pas à la violence, mais on a appris à vivre avec l’idée que cette violence, aveugle, scélérate, peut survenir partout, frappant au hasard des populations forcément innocentes. Les hôteliers n’ont donc guère à craindre trop d’annulations, inch Allah !
Des élections dans la ligne de mire
Quant aux Tunisiens, ils ont encore d’autres préoccupations. C’est peu dire que la Révolution de 2011 a déçu. Le pays doit faire face à une dette abyssale, le dinar ne vaut plus rien, le chômage s’est installé semble-t-il durablement et la corruption sévit à tous les étages. Alors que le pays est si riche de sa jeunesse et de tant de talents inexploités…
Les prochaines élections législatives, prévues pour le 13 octobre, suivies six semaines plus tard par l’élection d’un nouveau chef de l’Etat, ne s’annoncent pas dans la sérénité. L’environnement politique rappelle étrangement celui de 2011, dans sa diversité et le chaos indescriptible qu’il présente.
Hormis les islamistes d’Ennahdha, toujours aussi groupés et disciplinés, les autres expressions politiques sont très divisées, aussi bien les libérales, que les socio-démocrates, populistes ou radicales, comme l’estime le journal algérien El Watan.
Aujourd’hui, il y a sept ou huit formations, comprenant des groupes d’adhérents ayant appartenu, à un moment ou à un autre, au parti fondé par le président Caïd Essebsi, en juin 2012.
Celui-ci, âgé de 92 ans, victime d’un grave malaise le jour même du double attentat de jeudi dernier, sera-t-il encore en mesure de peser sur le destin de son pays ? Une nouvelle crise pourrait alors s’ouvrir, la Cour constitutionnelle, seule instance habilitée à constater une vacance du pouvoir, n’ayant toujours pas vu le jour…
Interview du 28/06/2019 sur CNEWS de René Trabelsi, Ministre du Tourisme
Le ministre Tunisien du Tourisme et de l’artisanat René Trabelsi a accordé, vendredi dernier, une interview à Jean-Pierre Elkabbach sur la chaîne de télévision française CNews.
Rassurant d’abord sur l’état de santé du président de la République, René Trabelsi a longuement expliqué qu’il n’y avait pas de « vacance du pouvoir en Tunisie » rappelant qu’il existe des institutions fortes et un « processus démocratique » clair. « Vous savez, le processus démocratique en Tunisie fonctionne très bien. Rien ne déstabilisera la Tunisie » a-t-il affirmé.
Interrogé sur l’impact des attaques survenues jeudi à Tunis, René Trabelsi affirme que le pays est « en état d’alerte permanent, à travers un plan vigipirate »: « Les attentats ont ciblé la police tunisienne (…) comme cela s’est passé en France, où l’armée et la police française ont été ciblées ».
Pour lui, ces attaques n’auront pas d’impact sur le tourisme tunisien: « Le tourisme en Tunisie c’est 500.000 emplois directs et 2 millions d’empois indirects, c’est 14% du PIB » a-t-il précisé tout en rappelant le retour massif des touristes en Tunisie et la confiance des tour opérateurs dans la destination.
« Les attentats d’hier avaient une cible: la police. Ce ne sont pas les touristes qui étaient visés. Les réservations sont en augmentation de 28% sur le marché français par rapport à l’année dernière, et jusqu’à septembre pratiquement tous les hôtels sont pleins » a indiqué René Trabelsi.
Il termine son intervention en disant que « La Tunisie c’est comme un bon boxeur qui encaisse mais qui reste toujours debout » avant d’adresser un message aux touristes: « Ils peuvent venir tranquillement venir passer leurs vacances en Tunisie. On les attend et on les remercie de leur confiance ».
L’intégralité de l’interview peut être visionnée via le lien suivant: https://www.cnews.fr/emission/2019-06-28/linterview–de-rene-trabelsi-855431