«Les marchés financiers vont apprendre aux Italiens à bien voter»

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Les Italiens sont furieux, car ils ont l’impression que les marchés financiers vont leur confisquer le résultat de leurs votes. Et la gaffe du commissaire européen au budget les confirme dans leur thèse du complot des marchés financiers contre le peuple.

Les citoyens n’aiment pas qu’on décide à leur place et encore moins qu’on leur fasse la leçon. C’est ce qu’a découvert, ou redécouvert, le commissaire européen au budget, l’allemand Gunther Oettinger.

Le moins que l’on puisse dire et qu’il a été maladroit, très maladroit. Alors que l’Italie est en pleine crise politique, il a déclaré que « les marchés financiers vont apprendre aux Italiens à bien voter ». Évidemment, cette déclaration sortie de son contexte a rendu fous les Italiens et en particulier les deux chefs des deux partis populistes arrivés au pouvoir. En fait, cette déclaration est du carburant gratuit pour ces deux partis populistes qui ne sont pas arrivés à imposer leur ministre des Finances au président du conseil italien.

Ce dernier a refusé de nommer ce ministre des Finances, car il a estimé qu’il est trop anti-européen et qu’il risquait de prendre des mesures contraires aux engagements européens de l’Italie. Bien entendu, les chefs de file de ces partis populistes ne voient pas les choses de la même manière.

Ils estiment que le président du conseil italien a abusé de son pouvoir et a confisqué le vote des Italiens qui ont voté pour ces deux partis antisystème. La déclaration du commissaire européen les renforce dans leur idée que le vote du peuple italien est confisqué, tantôt par un notable italien, et tantôt par un fonctionnaire européen qui brandit la sanction des marchés financiers pour faire peur aux Italiens.

« La finance ne sera jamais élue et pourtant elle gouverne »

C’est vrai que les investisseurs ont actuellement peur de la situation politique en Italie, la meilleure preuve c’est que pour acheter de la dette publique italienne ils demandent aujourd’hui un taux d’intérêt plus élevé qu’avant les élections.

Les taux d’intérêt se sont tendus et quand un pays comme l’Italie a une dette publique équivalente à 132% du PIB, c’est un très mauvais signal. Cela veut dire que juste par des déclarations politiques, la charge de la dette publique a fortement augmenté en quelques jours et donc si le remboursement de la dette publique italienne augmente automatiquement, cela laissera moins de marge de manœuvre au futur gouvernement italien.

Pour éviter d’être discrédité, le président de la Commission européenne, le luxembourgeois Jean-Claude Juncker a immédiatement essayé de rattraper la bourde de son commissaire allemand en disant que « le sort de l’Italie ne saurait dépendre des injonctions que pourraient lui adresser les marchés financiers ».

Le commissaire européen s’est aussi excusé auprès des Italiens en assurant qu’il ne voulait pas leur manquer de respect. En fait, tout cela c’est joli, mais ce n’est pas nouveau. Souvenez-vous quand François Hollande était en campagne électorale pour être élu président de la République, il avait désigné la finance comme son ennemi, en disant même « que la finance ne sera jamais élue et pourtant elle gouverne ». Mais ça c’est le discours. A peine élu à l’Elysée, son discours était déjà plus édulcoré, il disait simplement qu’il fallait « maîtriser la finance ». Au final, c’est la finance qui l’a maîtrisée.

En Italie, le débat va renaître. Les marchés financiers confisquent-ils la démocratie en empêchant un gouvernement démocratiquement élu d’imposer son programme ? Ou bien les marchés financiers sont-ils des garde-fous pour éviter des politiques économiques insensées et qui conduisent au désastre comme c’est le cas au Vénézuéla ? Le débat n’est pas prêt de se terminer.

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