En Suède, certaines voix s’élèvent pour s’inquiéter de la disparition silencieuse du cash. En effet, tel que c’est parti, la Suède pourrait être le premier pays du monde à voir le cash disparaître de la société. Sans doute autour de 2030.
Pareille disparition est voulue par la population ou du moins elle ne s’y oppose pas. Est-ce étonnant ? Les Suédois sont très friands de nouvelles technologies. Ne sont-ils pas les premiers à avoir adopté le téléphone mobile (Ericsson) ? Ils sont également les premiers à avoir fait le succès d’un site de partage de musique « disruptif » comme Spotify. Et en matière de paiement, ils ont adopté en un temps record une application dénommée Swish permettant à 6 millions de Suédois, soit plus de 60% de la population, de transférer de l’argent d’un compte à un autre en temps réel et sans commission. Résultat: dans la plupart des boutiques, magasins et autres restaurants, il n’est pas rare de voir des pancartes avec comme mention: « no cash accepted ». Bref, en Suède, plus personne ou presque ne paie avec du cash.
Mais si la grande majorité de la population suédoise se réjouit de la disparition du cash, les personnes plus âgées et les personnes malvoyantes ne sont pas très heureuses. Et elles le font savoir. D’où la question posée aujourd’hui par certains observateurs: une société « cash-less », c’est bien, mais qu’arriverait-il en cas de gigantesque panne informatique ou d’attaque d’un pays comme la Russie, par exemple ? Comment feront les Suédois s’il n’y a plus de cash ? La question mérite d’être posée, car il n’y a pas qu’en Suède qu’on rêve d’une société sans argent liquide. C’est le cas aux États-Unis et en Europe. Le plus souvent ce sont des économistes de banques centrales ou des banquiers privés qui disent que le cash, c’est dépassé et dangereux. Mais est-ce vraiment le cas ? Prenons les arguments un par un.
Premier prétexte: le cash coûterait cher en impression, en manipulation, en circulation et en transport. C’est vrai, mais l’absence de cash rendrait aussi les citoyens très fragiles face à une cyber-attaque. Et l’actualité récente a montré que même de grandes sociétés peuvent être piratées.
Le deuxième argument pour justifier la fin du cash, c’est qu’il serait utilisé par les trafiquants et les terroristes. Qui pourrait nier cela ? Mais ces personnes peu recommandables utilisent aussi nos autoroutes, nos lignes téléphoniques, faut-il pour autant supprimer nos routes et nos téléphones ?
Quant à l’argument de l’évasion fiscale, certes, il tient la route. Mais soyons de bon compte, il vise surtout les petits fraudeurs, car les grands ont des sociétés off-shore et des sociétés-écrans. Pour eux, pas besoin de cash pour ne pas payer d’impôts.
« Un monde sans cash, c’est le prélude à une société totalitaire cachée derrière un paravent de modernisme »
Non, en réalité, si des économistes de Banques centrales et des banquiers privés rêvent d’une société sans cash, c’est pour des motifs moins avouables. Les uns pour nous taxer sans notre consentement et les autres pour éviter la faillite. La démonstration ? Aujourd’hui, pour nous sauver de la crise, les autorités monétaires ont fixé les taux d’intérêt à un niveau très bas, proche de 0%.
En fait, si elles avaient pu le faire, les Banques centrales auraient même fixé un taux d’intérêt négatif. Autrement dit, le prélèvement aurait été considéré comme un impôt exceptionnel. Mais dans ce cas de figure, tous les épargnants auraient vidé après coup leurs comptes et les banques auraient fait faillite faute de liquidités. Si demain, il n’y a plus de cash nulle part, il ne sera plus possible de sortir son argent d’un compte bancaire puisqu’il sera totalement dématérialisé. En clair, un gouvernement despotique ou en faillite pourra nous imposer un prélèvement sans nous demander notre avis.
Le débat qui a lieu en ce moment en Suède est tout sauf anodin. Il est plus que probable que nous aurons ce même débat demain ou après-demain. Les sociétés de paiement et les sociétés technologiques (GAFA) veulent confisquer ce débat en traitant de rétrograde toute personne attachée à des billets de banque. Mais elles oublient juste de signaler qu’une société sans cash, c’est aussi le prélude à une société totalitaire cachée derrière un paravent de modernisme !