En cette période de l’année, les communiqués de presse pleuvent sur les bureaux de la rédaction. Un waterzooi parfois indigeste. Dans le tourisme comme ailleurs, la communication s’apparente souvent à dire que tout va bien à tort et (avec) raison. Et les mensonges ne sont pas rares.
Tout va très bien Madame la Marquise
Nouveaux robinets dans les cabines intérieures chez un croisiériste américain, investissements historiques à l’OT de Brive-La-Gaillarde, résultats exceptionnels pour le club de kayak de la samme, centre de fitness « technologique » sur le 12e pont d’un géant des mers, service « hautement qualitatif » dans les bars d’un armateur norvégien … les annonces débordent de superlatifs tous plus dithyrambiques à propos d’actualités … généralement très secondaires.
Fréquemment reproduites telles quelles pour faire du « remplissage vite-fait et (plus ou moins) bien-fait » dans les publications professionnelles, elles suscitent de moins en moins l’intérêt des lecteurs. Et pour cause, une fois le vernis élogieux gratté et confronté au vécu des passagers, force est de constater que la réalité est bien différente.
A trop crier au miracle, ces CP perdent toute crédibilité
C’est ce que nous avons pu constater une fois de plus en visitant le Pride of Bruges de P&O Ferries vendredi passé. Alors que le communiqué de presse annonçait un navire « profondément rénové », nous avons bien du constater qu’il ne s’agissait que d’un rafraîchissement, certes bien agencé. Mais du menu alléchant à la réalité de l’assiette, on reste le plus souvent sur sa faim.
Si l’une des attachées en communication nous parlait d’investissements à hauteur de 87,5 millions de Livres sterling (sic), une autre nous donna le chiffre (plus crédible) de 8,5 millions (NDLR: montant pour la rénovation des deux bateaux du groupe). Tout paraît bon pour faire parler de soi, que l’information donnée soit vraie ou pas.
Vers une communication déshumanisée
Sur papier glacé, un bel imprimé retrace l’histoire de la compagnie aux deux lettres. On apprend que le groupe est issu de l’union d’Arthur Anderson et de B. MacGhie Willcox et que P&O s’est vu attribuer un blason en 1937. On lit que depuis 2006, la compagnie a été rachetée par le Sultan Ahmed Bin Sulayem de Dubaï. C’est instructif et très bien écrit.
Néanmoins, à moins d’un mois des cérémonies du naufrage du Herald of Free Interprise, rien n’est repris à ce propos dans la ligne du temps. La compagnie, qui changea de nom à la suite de cet événement, réinvente l’histoire en parlant de fusions avec un groupe immobilier et avec Overseas Containers Limited. Si ce fait est bien réel, son origine est toute autre.
On peut comprendre que le groupe ne souhaite pas communiquer sur cet événement, vieux de trente ans. Les dirigeants ont changé et les méthodes de sécurité ont évoluées. Néanmoins, sur le sol belge et à quelques jours d’une date anniversaire tragique, cette absence est hautement inappropriée.
Pour ceux qui souhaitent en savoir plus sur la communication du groupe, ils sont invités à cliquer sur le lien suivant: https://www.youtube.com/watch?v=bFZsvTjc9I8
« L’angoisse suppose le désir de communiquer » nous dit Georges Bataille dans l’expérience Intérieure. Certes, la « bataille » économique fait rage et les commerciaux veulent rendre la mariée jolie. Mais pour des besoins économiques louables, il faudrait veiller à garder les pieds sur terre et parler vrai. Rien n’est pire que la perte de confiance. A bon entendeur…