Le Conseil d’administration de la compagnie belge décide d’axer son développement exclusivement sur le cargo et l’ACMI. L’activité passager, non rentable, s’arrêtera le 3 octobre prochain. Air Belgium a demandé au tribunal de l’entreprise l’ouverture d’une procédure de réorganisation judiciaire.
C’est une déception pour le secteur du tourisme belge, qui pouvait compter sur ses vols directs depuis Bruxelles jusqu’en Afrique du Sud et l’île Maurice. Suite à la « succession d’évènements externes ayant affaibli l’entreprise ces dernières années » (Covid, guerre en Ukraine, flambée des prix des carburants, inflation et baisse du pouvoir d’achat des clients) et compte tenu de « l’instabilité actuelle de l’environnement socio-économique et géopolitique« , le Conseil d’administration d’Air Belgium, qui s’est réuni ce lundi, a en effet pris la décision de « revoir sa stratégie de développement« .
Il souhaite désormais que la compagnie se concentre sur ses deux activités B-to-B vecteurs de croissance, à savoir le fret (cargo) et l’ACMI (leasing d’avions entre compagnies aériennes) pour des vols passagers et cargo, et de cesser son activité Passagers en propre, qui compte tenu de la concurrence accrue, se révèle être chroniquement non rentable jusqu’à ce jour.
“Toutes les options pouvant amener au maintien de cette activité ou au maintien des vols au-delà du 3 octobre 2023 ont été étudiées, mais la situation financière ne l’a pas permis”, regrette la compagnie dans un communiqué. “Les vols programmés avant le 3 octobre prochain seront assurés et les vols retour seraient pris en charge par Air Belgium, en propre ou par le biais d’autres compagnies aériennes. Les vols programmés après le 3 octobre 2023 et déjà payés par les voyageurs seraient annulés et seraient prioritairement remboursés dans le cadre de la procédure”. Et Air Belgium tient à s’excuser de devoir annoncer l’arrêt de son activité Passagers à si courte échéance.
La compagnie aérienne, dans un communiqué dont nous reprenons ci-dessous les grandes lignes, explique les raisons qui l’ont poussé à prendre cette décision. Et les implications de la procédure de réorganisation judiciaire.
Une accumulation d’évènements externes
Au cours des trois dernières années, le secteur aéronautique a connu de nombreux bouleversements qui ont sévèrement affecté la rentabilité de l’activité Passagers des compagnies aériennes et la compagnie Air Belgium ne fait malheureusement pas exception.
En 2020, suite au Covid, Air Belgium a été contraint d’immobiliser sa flotte ce qui a engendré une baisse soudaine et drastique de ses revenus alors que ses coûts fixes restaient identiques. Ce premier épisode a conduit à un affaiblissement de la situation financière de la compagnie.
En 2022, alors que la reprise post-Covid s’amorçait, le déclenchement de la guerre en Ukraine a engendré une hausse draconienne du prix des carburants conjuguée à une évolution négative du taux de change euros/dollars. Par ailleurs, l’inflation qui a succédé à l’augmentation drastique du coût de l’énergie a réduit le pouvoir d’achat des consommateurs.
Face à l’impossibilité de répercuter la hausse des prix des coûts fixes sur le prix des billets de l’activité Passagers, Air Belgium a pris la décision, en mars, de supprimer les vols vers des destinations non rentables fort sensibles aux prix telles que les Caraïbes et les Antilles françaises. L’ensemble de ces éléments ont eu un impact direct très sévère sur la rentabilité de l’activité et sur la trésorerie d’Air Belgium.
A partir du mois d’avril dernier, Air Belgium a concentré ses activités sur deux destinations principales : l’Afrique du Sud et l’Ile Maurice. La capacité des avions libérés a été allouée aux activités Charter et ACMI (cargo et passager).
Si les prévisions budgétaires d’Air Belgium anticipaient un retour à la rentabilité pour cet automne, « les difficultés financières du passé, liées à l’environnement actuel incertain et difficile, poussent Air Belgium à changer de stratégie« .
Un changement de stratégie et une croissance fondée sur le B-to-B
Face à un environnement socio-économique et géopolitique plus qu’instable et alors qu’une compagnie aérienne doit se projeter sur des cycles de 3 à 5 ans, le Conseil d’administration d’Air Belgium a pris les décisions suivantes afin d’assurer la pérennité et le développement de l’entreprise qui occupe 500 collaborateurs.
- Se concentrer sur les deux activités rentables qui offrent des perspectives de croissance, c’est-à dire le fret (cargo) et l’ACMI (Aircraft, Crew, Maintenance and Insurance, ou wet lease), soit du leasing d’avions entre compagnies aériennes pour des vols passager et cargo, deux activités rentables qui offrent des perspectives de croissance.
- Cesser l’activité Passagers : malgré les nombreux investissements faits par Air Belgium sur les dernières années et le renforcement des initiatives commerciales, l’activité Passagers reste non rentable. Après plusieurs études, le Conseil d’administration d’Air Belgium a conclu que pour rendre cette activité bénéficiaire, il faudrait réaliser des investissements complémentaires significatifs à ceux déjà réalisés ces dernières années, ce qui n’a pas été possible.
- Introduire une procédure de réorganisation judiciaire par accord amiable : afin d’assurer sa pérennité et son développement et de laisser le temps à l’entreprise de se réorganiser en interne autour de ces 2 pôles.
Implications d’une procédure de réorganisation judiciaire
Air Belgium a demandé au tribunal de l’entreprise l’ouverture d’une procédure de réorganisation judiciaire. Le tribunal examinera dans les jours à venir la demande d’Air Belgium. Si le Tribunal accorde la PRJ, la société pourra négocier des accords avec ses créanciers en vue de réduire sa dette. Ces accords peuvent notamment inclure la négociation de conditions plus avantageuses, la réduction partielle de la dette existante et le report des intérêts. La procédure vise également à réorganiser les activités de la société en cédant ou, le cas échéant, en cessant les activités non-rentables dont la poursuite ne présente pas de perspective de viabilité.
La PRJ vise à assurer la pérennité de la société et en aucun cas l’entité juridique n’est vouée à être impactée.
Implications pour les vols passagers
Les vols programmés avant le 3 octobre 2023 seront assurés et les vols retour seraient pris en charge par Air Belgium, en propre ou par le biais d’autres compagnies aériennes. Les vols programmés après le 3 octobre 2023 et déjà payés par les voyageurs seraient annulés et seraient prioritairement remboursés dans le cadre de la procédure.
Implications pour le personnel
Une PRJ ne concerne pas directement l’emploi mais les créanciers. Les employés liés à l’activité Passagers restent actifs durant la procédure et au-delà, la direction entend les réaffecter graduellement aux autres activités opérées par la société.
Poursuite des activités Fret et ACMI
Les activités fret et l’ACMI (passagers et cargo) restent assurés en continuité d’exploitation durant toute la durée de la procédure et au-delà, le but étant de pouvoir renforcer ces deux activités dans le futur.
Comme Pagtour l’avait annoncé il y a quelques jours, Air Belgium a récemment conclu un accord de location avec équipage avec la LOT, d’une durée d’un an. La compagnie belge opère ainsi en ACMI entre Varsovie et New York pour le compte du transporteur polonais, desserte assurée par l’un des deux Airbus A330-900 d’Air Belgium.
VDM