14 explications sur les préjugés (faux et justes) sur Airbnb

Vous en avez assez d’entendre parler d’Airbnb en bien ? Vous n’en pouvez plus que l’on dise que ce que fait Airbnb est mal ? Vous êtes perdu tant on dit tout et son contraire à propos d’Airbnb ?

Voici quelques 14 explications à propos de préjugés sans doute exacts et d’autres complètement inventés pour resituer le débat, devenu bien trop passionnel et contre-productif.

1 – Le Bouc émissaire :

Bien que pas tout seul sur ce créneau de la location de logements de particuliers à des touristes et vacanciers, Airbnb est bel et bien la cible grasse de toutes les polémiques du moment.

L’opérateur américain, lancé depuis à peine 2008, a été érigé par ses détracteurs comme la nouvelle bête noire à abattre (en lieu et place de Booking, contre lequel on s’est calmé).

Il est le symbole du mal parfait, tel un vulgaire Uber du logement touristique. L’opérateur est la tête de turc du moment.

Il n’est évidemment pas question ici de prendre parti, pour ou contre Airbnb (ou d’autres). Face à ses adversaires (agresseurs ?), le loueur sait très bien se défendre lui-même. Nous restons, comme toujours, le plus objectif possible.

On sent d’ailleurs ses dirigeants de plus en plus agacés lors de leurs interventions dans les médias. Mais, qui pourrait garder son self-control face à une telle déferlante d’attaques frontales, souvent sournoises, fréquemment injustes et de mauvaise foi ? Elles sont conduites en premier chef par les hôteliers, suivis par des mairies de grandes villes, voire par les élus des deux assemblées. Aidés par une armée de journalistes qui croient ainsi défendre un village gaulois contre l’envahisseur.

C’est d’ailleurs précisément le jeu poursuivi par les dénonciateurs : faire sortir les patrons d’Airbnb de leurs gonds et les laisser tout seuls se donner un mauvais genre. Mais cela n’arrive pas. Ou pas encore. Ce sont des professionnels.     

2 – Un succès bien réel :

Airbnb (et ses concurrents challengers) plaît bigrement à ses clients hébergés, qui seraient près de 140 millions dans le monde. Ils étaient 40 millions en 2015 et 80 millions en 2016 ! Le site, ses garanties et ses procédures sont parfaitement appréciées par tous (hôtes et clients), tout comme la majorité de son offre fournie par les propriétaires de maisons et d’appartements. De quoi susciter un joli bouche-à-oreille, mais aussi des jalousies.

Pour autant, cette activité en pleine explosion et au succès insolent cache une rentabilité qui est pour le moment absente, sans qu’on ne connaisse l’étendue du problème. Les chiffres donnés depuis ses débuts par Airbnb sont toujours très parcellaires.

3 – Une offre dont la France a besoin :

Si la France veut s’attirer les fameux 100 millions de visiteurs étrangers d’ici 2020, sans compter le public et les intervenants qui viendront pour les prochains JO, elle ne le pourra qu’en comptant sur ces hébergements particuliers. Tout le monde le sait, dont en premier le gouvernement. Dans un même temps, ces locations touristiques rapportent beaucoup plus d’argent dans les destinations qu’on ne veut l’admettre (voir ci-dessous).

4 – Des hôteliers sous influence :

Les hôteliers sont divisés. Les plus nombreux (apparemment) se laissent clairement influencer, pour ne pas dire infantiliser.

Leurs influenceurs cherchent à leur faire croire qu’Airbnb leur prendrait massivement des clients et que leurs problèmes économiques seraient dus, en tout ou partie, à la plateforme collaborative. La campagne anti-Uber menée par les taxis a fait des émules du côté des hôteliers.  

Force est de reconnaître qu’ils ont tort. Les taux d’occupation de l’hôtellerie sont quasiment inchangés depuis ces 15 dernières années (en dehors récemment de 2016, à cause des attentats), malgré la création significative sur ce même laps de temps de nouveaux hôtels en milieux urbains (+ 7 %) et la très forte expansion d’Airbnb et ses concurrents : voir notre Panorama de l’hôtellerie en France.

Ces discours, basés hélas sur rien de solide et expliquant qu’Airbnb viderait les hôtels, sont d’autant plus caduques que les mêmes accusateurs reconnaissent que l’année 2017 aura été la meilleure pour l’activité hôtelière depuis des lustres. Et pourtant, Airbnb n’a jamais eu autant de locations à la disposition du public cette année-là. Donc ?

A côté de ces récalcitrants, de plus en plus d’hôteliers français et d’outre-Atlantique (17.000 hôteliers américains) — aux concepts de charme rejoignent Airbnb et se laissent volontiers inscrire sur son site pour y être revendus. Il en va de même de certains groupements hôteliers français, à l’instar des Collectionneurs, qui ont pris des accords commerciaux avec l’opérateur.

Plus largement, plutôt que de se lancer dans des empoignades contre Airbnb, de grands groupes hôteliers cherchent au contraire à s’inspirer des recettes de sa réussite et d’en tirer avantage. 

5 – Une fausse concurrence :

Plusieurs enquêtes auprès des voyageurs, dont la nôtre, révèlent bel et bien que l’hôtellerie et les autres formes d’hébergements sont dissociées dans l’esprit des clientèles qui voyagent. Chacune a ses spécificités, recherchées selon les motifs de séjours, les publics et les besoins.

Tout comme la bicyclette et la voiture ne sont pas vraiment des concurrents, n’étant pas utilisés pour les mêmes raisons et de la même façon. Ce qui n’empêche pas que l’on peut être client / utilisateur des deux. Mais, pas en même temps.

La majorité des clients déclarent qu’ils ne se seraient pas rendus dans une destination sans la présence d’offres Airbnb. Et, n’auraient de toute façon pas, en définitive, choisi un hôtel ou une autre forme d’hébergement touristique. C’est notamment le cas des millennials qui représentent plus de 60 % de la demande chez Airbnb. Ce nombre a augmenté de 120 % au cours de la dernière année. C’est aussi la clientèle qui fréquente le moins les hôtels, en voyages de nature privée.

Toutes les études confirment cette réalité : qu’on accepte d’y croire ou pas, les hôtels, c’est une autre clientèle que celle d’Airbnb, qui ne les affecte quasiment pas. Surtout sur le marché des voyages d’affaires et des courts séjours, pour lesquels l’hôtellerie a un quasi-monopole.

Quant à la concurrence dite déloyale, elle ne peut être démontrée si toute la réglementation adaptée à ce type d’hébergement touristique est respectée par les uns (Airbnb) et les autres (les propriétaires de logements mis en location). Ce qui est globalement le cas (voir plus loin).  

6 – Une argumentation malhonnête contre Airbnb :

Après l’avoir accusé de tous les maux, la dernière astuce consiste à expliquer à la presse — qui s’empare du sujet comme un affamé saute sur du pain ­et ne vérifie pas ses sources —, que le nombre de clients venus via Airbnb dans une destination rurale équivaudrait au remplissage de plusieurs dizaines d’hôtels, et par voie de conséquence … à leur mort.

Pure désinformation, rien n’est plus inexact et manipulatoire comme explication, pour les raisons déjà évoquées ci-dessus (différences de clientèles et d’attentes).

Le déclin de l’hôtellerie en milieu rural, dont on reparle, est bien plus ancien qu’Airbnb, qui n’y est pour rien. Notre premier Livre Blanc sur la Modernisation de l’Hôtellerie Française, publié en 2007 (soit un an avant que ne naisse Airbnb), décrivait déjà les affres de la petite hôtellerie à la campagne et dans les petites villes.

Son agonie, aujourd’hui encore, est surtout due à :

  • des raisons structurelles (trop de petits hôtels, des seuils de rentabilité en forte hausse, insupportables pour des unités hôtelières de moins de 25 chambres),

  • une commercialisation pratiquement absente,

  • des produits vieillissants à vétustes, qui n’attirent plus,

  • des exploitants souvent dépassés et démobilisés.

De plus, avant de rejoindre le loueur américain, les meublés de tourisme étaient souvent sous d’autres labels, tel les Gîtes de France ou Clévacances. Il n’y a donc pas eu la création entière d’une nouvelle offre de locations privées à la campagne via les plateformes collaboratives.

7 – Une évolution des arguments anti-Airbnb, en plusieurs phases :

La première, donc, consistait, il y a environ deux ans, à prétendre qu’Airbnb et ses confrères aspiraient en bloc des clients aux hôtels. Mais, ni en France, ni aux Etats-Unis, les deux premiers pays où Airbnb est très présent, il n’a été possible de démontrer cette accusation avec honnêteté. L’argument, arrangé et trop facile, ne fonctionnant plus, on est donc passé à autre chose.

L’étape suivante, actuelle : on affirme que si Airbnb a le droit d’exister, il faut au moins que lui et son réseau travaillent selon les mêmes règles de concurrence et d’obligations que l’hôtellerie. Cette dernière est en effet écrasée par des contraintes réglementaires en cascade, qui s’amoncellent depuis une dizaine d’années, sans faire bouger d’un cil les représentants de la profession.

Mais d’une part, un hôtel recevant des dizaines à des centaines de voyageurs chaque nuit ne peut raisonnablement être comparé, dans son fonctionnement et ses risques, à un appartement qui n’accueille qu’un couple ou une famille de touristes quelques jours ou semaines par an.

D’autre part, les hôteliers, au lieu de demander à leurs organisations patronales de travailler auprès du gouvernement et du législateur pour faire alléger la lourde réglementation qui leur est imposée — laquelle est dénoncée à juste titre comme souvent exagérée et inutilement coûteuse — préfèrent, à les entendre, que les autres supportent la même chose qu’eux.

Ce serait comme si une personne handicapée, circulant en chaise roulante, exigeait que tous les individus valides qu’elle croise se déplacent comme elle …en chaise roulante. Absurde.

On notera que l’indignation des hôteliers concernés est à géométrie variable. Ils ne dénoncent pas les résidences de tourisme, pourtant bien plus favorisées sur le plan de la fiscalité et de la réglementation, par rapport à l’hôtellerie, sans que cela ne se justifie et sans que cela n’émeuve les énervés…   

8 –  Le double langage :

Les mairies des grandes villes sont conscientes que les logements chez les particuliers attirent immanquablement un nouveau public, générateur de retombées économiques et de notoriété pour la ville. Mais aussi que cette offre n’affecte pas l’hôtellerie. Donc, par leur communication, elles cherchent à ménager la chèvre et le chou : ne pas effrayer les touristes et les propriétaires de logements (également électeurs), tout en faisant mine de soutenir les hôteliers.

Même chose du côté des élus nationaux, qui menacent Airbnb et ses concurrents de pondre de nouvelles lois pour les serrer, tout en logeant dans les appartements qu’ils proposent lorsqu’ils se rendent à Paris pour leur travail parlementaire ou à l’occasion de leurs vacances.

Enfin, de nombreux hôteliers qui dénoncent Airbnb ont dans un même temps un ou des maisons / appartements qu’ils mettent en douce en marché chez Airbnb…     

9 – Une campagne de dénigrement très mauvaise pour l’image de l’hôtellerie :

L’action revendicatrice via les médias et la posture agressive permanente des va-t-en-guerre pour combattre Airbnb produisent un grave risque de mauvaise image de la profession hôtelière auprès de l’opinion.

« Une mauvaise image fait du mauvais commerce et provoque la fuite des clients ».

Outre ce côté acariâtre, qui discrédite forcément tant il est aveugle, la charge médiatisée en continue contre Airbnb peut être facilement comprise comme un véritable mépris et un désaveu à l’égard des millions de clients qui optent pour ces hébergements privés. Or, ces derniers sont souvent également des clients de l’hôtellerie (clientèle d’affaires, par exemple). Tout comme les dizaines de milliers de propriétaires de logements peuvent l’être. Cela équivaut à dénigrer ses propres clients. Pas très commerçant…

Puéril est également le fait pour les syndicats hôteliers et l’association anti-Airbnb de se réjouir publiquement dès qu’une nouvelle information paraît, risquant de mettre Airbnb en difficulté. Et de diffuser aussitôt des communiqués de presse pour exprimer leur pernicieuse satisfaction, en attendant qu’on leur montre d’autres failles.

Se donner le rôle de David (le gentil) contre Goliath (le méchant) n’est pas moins une approche naïve.

Les attaques des hôteliers contre Airbnb (comme contre les OTAs) ne sont que des cailloux jetés contre un blindage robuste. Cela ne raye même pas sa peinture. Et ne le freine pas davantage dans sa lancée dynamique à succès auprès du public.

  10 — Des contraintes bien réelles à l’encontre des loueurs :

S’ils ne sont pas des hébergeurs professionnels, avec un statut et des obligations correspondants, on demande désormais ici et là aux propriétaires de logements voulant les louer à des touristes de respecter des règles, le cas échéant :

  • S’enregistrer en mairie, afin de mieux les contrôler,

  • Déclarer leurs revenus de locations et payer les impôts idoines,

  • Limiter le nombre de locations à 120 jours par an,

  • Collecter et reverser une taxe de séjour.

La fin de la carte prépayée proposée par Airbnb (par la société américaine Payoneer), suspectée de favoriser la fraude fiscale des propriétaires (les hôtes), est annoncée pour 2019, alors qu’elle ne concernait qu’environ 10 % des hôtes, dont très peu de Français.

On tente enfin de faire payer à Airbnb davantage de taxes et d’impôts en France, alors qu’il joue — pourtant légalement comme tant d’autres multinationales — sur les avantages de la délocalisation consentis par l’Europe. En France, où son chiffre d’affaires était estimé à 60 millions d’euros, Airbnb n’aurait payé que 69.168 euros d’impôts en 2015 grâce à sa pratique de l’optimisation fiscale.

Toutes ces règles — anciennes, nouvelles ou à venir — paraissent bien normales et ne peuvent faire l’objet d’aucun étonnement. Pouvant décourager une petite partie des propriétaires trop anxieux ou trop gourmands, elles ne devraient pas empêcher Airbnb de continuer à avancer, avec plus de transparence, on l’espère.

11 — Des retombées économiques évidentes :

Il arrangera un maximum de détracteurs d’Airbnb d’ignorer que les touristes et les vacanciers qui logent dans des maisons et appartements loués sont de vrais consommateurs. Outre les impôts qu’ils dépensent directement (TVA, taxes de séjours), ils achètent et consomment tout au long de leurs séjours : des prestations culturelles et/ou de loisirs, de la restauration, de l’alimentation, du transport, des biens, etc. Cela se chiffre en centaines de millions d’euros chaque année.

Ce sont évidemment autant d’emplois et de revenus qui profitent directement aux territoires, à leurs entreprises concernées (restaurateurs, commerçants, fabricants…) et par ricochet à leurs habitants.   

12 – Des nuisances locales :

Le trop, c’est toujours de trop ! La Mairie de Paris dénombrerait environ 20 à 30.000 logements via Airbnb dans sa ville. Il est évident que les immeubles où vont et viennent des touristes avec leurs bruyantes valises à roulettes, où des jeunes en Airbnb font parfois la fête tous les soirs et où l’on ne respecte pas la quiétude de la copropriété, sont fatalement une pollution et une gêne bien réelle pour les voisins. On s’accommode de la concentration des visiteurs dans les quartiers touristiques. Mais pas question de les laisser entrer jusque dans nos immeubles. Cela se conçoit.

Sans compter la disparition des locations pour les habitants au profit des touristes et vacanciers ou encore la valse des prix des loyers.

Il n’en demeure pas moins — plusieurs études le confirment / le rappellent, dont celles de l’Insee et de l’Observatoire de l’habitat —, que ce phénomène de la désertification des grandes villes pas ses habitants n’est évidemment pas récent. Il a de nombreuses sources déjà anciennes, autres que le tourisme (spéculation immobilière, baisse de la natalité, paupérisation, pollution, augmentation des attentes en termes de qualité de vie…). Cette situation existait bien avant l’avènement d’Airbnb, qui a aujourd’hui bon dos.

13 — La disparition d’Airbnb ne profiterait à personne :

De plus, avant de rejoindre le loueur américain, les meublés de tourisme étaient souvent sous d’autres labels, tel les Gîtes de France ou Clévacances. Il n’y a donc pas eu la création entière d’une nouvelle offre de locations privées à la campagne via les plateformes collaboratives.   

14 — Une offre alternative qui inspire des hôteliers et designers :

Les plus malins parmi les professionnels de l’hébergement — et ils sont de plus en plus nombreux — ont compris qu’Airbnb, avec sa redoutable efficacité commerciale, la qualité de ses offres et son positionnement intelligent sur le marché, pouvait être une véritable source d’inspiration.

Déjà le lifestyle généralisé dans le design des nouveaux hôtels est influencé par le côté « comme chez soi » que l’on trouve dans le « collaboratif ». La dynamique dans la mise en marché des locations par Airbnb apporte des idées réutilisables. La proposition de prestations périphériques et de services de proximité aux personnes hébergées en inspire déjà plus d’un.

Pas la peine de chercher midi à quatorze heures : Airbnb est le fruit d’Internet qui rénove en profondeur le tourisme. Il y a ceux qui l’acceptent et qui parviennent à évoluer salutairement avec lui. Et ceux qui le refusent et qui vont disparaître pour n’avoir pas su / voulu s’adapter.

Avec tout ce qui contraint Airbnb aujourd’hui, est-ce que la haine exercée contre lui, aura une fin ? Elle est souhaitable pour passer à autre chose, pour travailler sur la modernisation de l’hôtellerie et pour respecter les choix du public.  

Mark Watkins

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